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Pas qu’on me l’a demandé, mais je suis en train d’explorer le sujet et donc j’en vois des avantages comme des inconvénients. Attention, mon avis va comporter des points positifs et négatifs et n’est pas tranché.
J’avais commencé à tester ChatGPT quand je faisais certains de mes outils en ligne. Ne serait-ce, au début, que pour essayer de solutionner des problèmes compliqués ou pour expliciter ou convertir d’un langage à un autre du code trouvé ailleurs.
Désormais, je peux demander « fais-moi un outil qui fait ça » et il me pond tout ça en 10 secondes alors que ça m’aurait pris une heure de code et 4 jours de documentation.
C’est le cas de cet outil par exemple, qui est un lecteur hexadécimal d’un fichier quelconque.
Hormis le design et un poil le CSS pour s’adapter à mon template perso, tout le reste a été fait par Claude.ia (version gratuite). Y a pas beaucoup de code, mais c’est assez spécifique, et le résultat est là : ça marche d’entrée de jeu. La requête que j’ai faite c’est ça :
Can you create a page where I can explore files as an hexeditor? The page should have a file selector. The display should be done line by line with the index on the left, hex data in the midle and ascii on the right
Si je traduis :
« Peux-tu me faire une page web où je peux explorer un fichier tel un éditeur hexadécimal ? La page doit avoir un sélecteur de fichier. L’affichage se fait ligne par ligne avec l’index sur le côté gauche, les données au centre et la correspondance Ascii sur le côté droit. »
Et bim ça me pond un truc complet. Il fait lui-même les lignes flexibles et le fait qu’on ne doive pas sélectionner l’index sur la gauche.
Alors oui, je sais que ce code est probablement pompé d’un autre outil ailleurs, ou une lib quelque part sur GitHub et dont le readme.md correspond plus ou moins à ce que je demande. Mais tout de même : il a confectionné la page, indenté tout ça à sa façon et ajouté des styles plutôt sympa qui étaient totalement en phase avec les différents outils/pages/codes que j’avais demandés plus tôt.
Ce que je veux dire, c’est que ça n’a pas non plus recraché bit pour bit ce qu’il a trouvé.
Maintenant, cet outil était parfait et j’ai jeté ça dans une page à moi, retouché quelques trucs mineurs, et mis ça en ligne.
Cette expérience correspond cependant à l’exception. Des outils créés par ChatGPT ou par Claude.AI qui marchent du premier coup, ça reste rare.
La version limitée de ClaudeAI permet seulement 4 ou 5 itérations d’une même requête, et donc un nombre restreint d’améliorations ou corrections d’un truc qu’il a fait. La version payante n’est pas réellement plus puissante, mais elle permet davantage d’itérations d’un même projet (qui finit généralement par s’embourber à force de modifier des trucs déjà retouchés, et qui fait qu’il faut s’adapter à sa façon de fonctionner). Ça reste donc limité, mais ça permet de découvrir des astuces qu’une IA peut trouver ou découvrir, alors que nous, à moins de connaître toute la doc d’un langage par cœur, on se serait contenté de passer par une lib externe (regardez le code de l’outil : c’est du JS natif très léger).
Maintenant quoi dire de plus ? Sayé, je suis un gros défenseur du code pondu par IA ?
Non.
Un gain de temps certain, mais une qualité qui reste à désirer
J’en suis — actuellement — à reconnaître pleinement les gains de temps que cela procure pour les routines simples et les codes que je pourrais écrire moi-même avec beaucoup plus de temps. Lui le fait en 15 secondes et moi en plusieurs heures.
Généralement la seule chose qui reste à faire avec le code produit, c’est quelques tweaks algorithmiques, des inversions de boucles, ou ajouter un cas précis qu’il aurait oublié. Des trucs mineurs.
Par contre, dès que le projet devient un peu complexe, là l’IA, que ce soit Claude ou ChatGPT, se chient dessus complètement. Le code ne compile même pas, il utilise plusieurs fois le même nom de variable, ou alors utilise un const au lieu d’un let… bref, de petites choses que même un commercial ne ferait pas. Il manque des choses, des routines de vérification qui n’ont rien avoir avec le principe d’un LLM, mais des trucs spécifiques à la programmation qui demandent de l’intelligence véritable et pas juste des stats de langage.
L’on voit qu’il ne fait que concaténer des bouts de code qu’il trouve à droite et à gauche et les rendre cohérents (noms de variables tout ça). Il subsiste tout de même une phase de débogage manuelle sur le code final.
Est-ce que cette phase va finir par sauter ?
Je pense que oui, quand il pourra exécuter son code et analyser les erreurs du compilateur, pour ensuite les corriger.
Est-ce que ça va remplacer un programmeur humain ?
Non, je pense pas.
… Et est-ce que ça va permettre à une entreprise de diviser par 10 le nombre de programmeurs ?
Ça je pense que oui. Par contre, il faudra les remplacer par autant d’experts qui savent parler à l’IA et formuler les requêtes qui vont bien (tout en sachant programmer). On restera donc bien loin d’un entrepreneur qui va produire de gros logiciels très importants avec juste une armée d’IA.
… Ah et il faudra probablement aussi une armée d’avocats car l’IA aura craché du code copyrighté et que les huissiers vont commencer à toquer à la porte, mais ça c’est autre chose.
… et sans parler des ressources nécessaires pour entraîner l’IA, là ça sera la planète qui va gueuler car aujourd’hui ce n’est absolument pas viable (voir le dernier chapitre de cet article).
Quoi qu’il en soit, d’un point de vue de la qualité du code produit, j’en suis à ce stade. Il est possible que ce soit moi qui ne suis pas très doué pour formuler les bonnes requêtes pour obtenir un résultat satisfaisant du premier coup, mais je donne mon avis, mon retour et ma perception, pas la vérité sur la question. Get over it.
Pour le moment donc, le truc fait gagner du temps, mais ne fait pas encore le café.
Je le vois donc un peu comme un robot de cuisine (style Thermomix) : c’est utile et procure un gain de temps pour les choses triviales et chiantes, mais il faut apprendre à s’en servir, et il faut tout de même le nettoyer à la fin.
Et dans tous les cas, le gâteau arrivera seulement plus rapidement : il n’en sera ni forcément meilleur, ni plus sain non plus.
Le risque de prendre la parole d’IA comme vérité absolue
Concernant les IA qui sont plus généralistes, style ChatGPT (pas réellement orienté niveau programmation comme Claude.AI), il faut bien voir que ce sont essentiellement des moteurs de recherche qui trient un peu mieux que les autres et qui nous recrachent des réponses, pas seulement une liste de pages web.
Maintenant, si les données qu’on donne à manger à l’IA sont bonnes, la réponse à une requête sera bonne. Sinon, ça sera de la merde. Et comme il ne sait pas faire le tri entre le vrai du faux, de la merde, il en bouffe à la pelle avec tout le reste.
Et le pire — le pire — c’est qu’autant un moteur de recherche comme Bing ou Google nous dit quand il n’y a pas de résultats disponibles, autant ChatGPT s’il n’a pas la réponse, il va en inventer une. La réponse paraîtra plausible, mais sera sortie d’un chapeau sans aucune preuve de véracité.
C’est comme si vous me demandez de parler en suédois.
Voyez ce texte par exemple :
Steja padora vente ta prådager pro bönök oätt fön in a la sköng. I väks rahi promkre misek up paringst restöter by tsökar er. Toninahl år skroffa i mantska sallartöd.
Alla människor är födda fria och har lika värde och rättigheter. De är utrustade med förnuft och samvete och bör handla gentemot varandra i en anda av broderskap.
Ici, l’un des deux est du vrai suédois (c’est l’article premier de la DUDH en suédois). L’autre est du charabia suédoïde produit par mon générateur de noms de meubles Ikea qui utilise l’analyse de fréquence des lettres et des sons dans une langue donnée.
Un Suédois n’aura pas de mal à discerner les deux, mais n’importe qui d’autre n’y verra que du feu..
Eh bien ChatGPT, et même toutes les autres IA actuellement c’est exactement ce qu’ils font, constamment, avec le fond d’un contenu. C’est juste un peu plus précis, mais cela reste de la génération basée sur des probabilités quand-même.
Et dans les rares cas où une requête est tellement technique ou tellement hors sol qu’il n’a aucune source à laquelle se rattacher, eh bien il va sortir des mots au hasard et pondre un texte syntaxiquement et grammaticalement correct, possibilité plausible pour quelqu’un qui ne connaître rien au sujet, mais complètement à la ramasse sur la véracité du fond. Et à mes yeux, c’est ça qui est dangereux.
Hélas, je vois de plus en plus de gens prendre pour argent comptant ce que leur sort ChatGPT.
Je trouve ça très inquiétant quant à l’avenir de notre société : où va-t-on — sérieusement — si l’on remet dans les lois du hasard et des probabilités les réponses à nos questions ? Surtout si ces réponses vont dicter notre conduite, notre façon de diriger le monde, de gérer notre argent, de gérer une entreprise ou juste « enrichir » nos connaissances personnelles (de choses potentiellement fausses, donc) ?
On peut très bien se moquer de ceux qui brandissent la Bible ou le Coran pour dire que ceci ou cela est autorisé, interdit ou existe, ou s’est produit et quand ; mais si c’est pour brandir ChatGPT ou une IA à la place qui est tout aussi éclatée, ça n’en vaut pas le coup.
Il n’y a pas une once d’intelligence dans ces machines. Et comme la plupart du temps les questions que l’on pose à ChatGPT sont des questions auquel l’on n’a pas la réponse, comment on fait pour savoir si ce qu’il répond est juste ou faux ?
On ne peut pas.
Dans le doute, il faudrait considérer ça comme faux. Dans les faits, c’est le contraire qui se produit. Seul quelqu’un d’expert dans le domaine peut alors détecter l’erreur.
Mais maintenant, qui est l’expert devant le ChatGPT tout puissant dont la réponse a fait le tour du monde et est devenue une vérité générale en moins de temps qu’il n’en faut pour l’expert en question d’écrire un papier pour dire que c’est faux ?
C’est à ça qu’il faut faire attention.
L’IA n’est pas prête pour nous, car il reste des imperfections, mais nous ne sommes pas prêts non plus pour l’IA par manque de prudence, d’intelligence, de sagesse.
Des exemples assez drôles de ChatGPT-Fails sont visibles par exemple dans cet article ou celui-ci.
Donc on arrête les IA ?
Est-ce que dans l’ensemble ces trucs-là doivent être arrêtés et jetés par la fenêtre ? Non.
Côté technique et pertinence des résultats, on n’est qu’au début et ça sera amélioré et corrigé, comme tout. Ce n’est qu’une question de temps pour obtenir des choses précises et fonctionnelles du premier coup (pour du code par exemple).
Il subsiste par contre un problème de taille : l’énergie et les ressources requises pour les faire tourner. Là je n’ai pas de solution, et je ne sais pas comment ça va finir non plus. Et comme je ne suis pas une IA, je ne vais pas vous en inventer une. On peut en revanche faire des suppositions éclairées, des extrapolations de ce que l’on sait.
Le problème de notre civilisation actuellement c’est l’énergie. On utilise essentiellement de l’énergie fossile (que ce soit directement ou pour produire de quoi produire de l’énergie renouvelable, ce qui est en soi une aberration mais passons) qui pose un problème majeure à notre civilisation. Réellement : nous somme sur la trajectoire d’une destruction, et tout indique que nous continuons d’accélérer en direction de ce mur.
Pourquoi ? Dans les années 1950, on pensait à un avenir où l’énergie serait illimitée : d’où l’idée des voitures volantes partout et l’insouciance quant à la consommation et l’efficience des appareils. Sauf que cette révolution énergétique n’a jamais eu lieu. À la place, on a une la révolution de l’information : c’est l’information est qui est illimitée, accessible partout, et traité d’une façon qu’on n’avait pas anticipée d’aucune manière.
Ça a ses avantages, mais nos ressources énergétiques sont toujours limitées et c’est bien ça qui fait tourner tout l’ensemble. C’est ça qui est source de conflits, de guerres, de tensions et du problème climatique.
Je pense que notre civilisation est foutue et qu’on va droit dans le mur. Néanmoins ça ne m’empêche pas de sortir la carte du futurisme : l’étude du futur, au sens de 10 000 ou 100 000 ans dans le futur, voire plus. On va dans la science-fiction, mais avec davantage de science que de fiction.
Dans ce cadre-là, et si l’on parvient à éviter le mur climatique qui se profile, je la vois notre révolution énergétique : des sphères ou des essaims de Dyson capter l’énergie d’une étoile entière, et l’utiliser comme on veut.
Dans ce cadre-là, l’énergie n’est plus un problème, et les ressources non plus : si on est capable de faire ça, on est capable de miner tous les astéroïdes pour en faire des calculateurs. L’univers est virtuellement illimitée à notre échelle actuelle.
Nos travaux de recherches sur l’IA actuellement sont largement en avance par rapport à ce que l’on peut se permettre au vu de nos ressources disponibles. Mais placé 10 000 ans dans le futur, tout ça sera normal et possible sans « détruire » l’environnement (on peut très bien exploiter sans détruire).
Dans ce cas, oui, des machines qui produisent le logiciel et même d’autres machines pour subvenir à n’importe quel de nos besoins techniques et technologiques, ce sera notre quotidien.
Tous les efforts mis sur l’IA actuellement ne sont donc pas perdus. Ils sont juste… anachroniques. On a la théorie pour étendre ça à des échelles monstrueuses, c’est juste qu’on n’a pas — encore — les ressources pour.
Il n’y aurait pas de problèmes de consacrer des ressources pharaoniques à n’importe quel projet, si ces ressources sont illimitées.
Nos travaux sur les systèmes d’IA actuellement nécessitent une quantité importante d’énergie que nous peinons à produire, et que nous produisons en détruisant notre climat aujourd’hui.
Hélas, nos travaux sur l’énergie propre et illimitée sont largement moins financés que ce qu’ils devraient, là où les IA sont subventionnées à la pelle.
Les ressources seraient bien mieux allouées, selon moi, si l’on faisait les choses dans l’ordre.
Une suffisance énergétique solutionnerait plus de problèmes qu’une IA, pour notre civilisation dans son ensemble. Malheureusement, ce n’est pas le bien être de la société (ou de la planète) qui gouverne les allocations de ressources, mais l’économie et la stabilité financière, même si l’on parle de bulles et de secteurs non rentables à l’heure actuelle.
Deux choses qui ne sont pas du tout en train d’être conciliables actuellement.
Interdire la distribution des publicités papier non adressées dans les boîtes aux lettres sauf dans celles avec un autocollant « Oui Pub ». Cette expérimentation, visant à réduire le gaspillage de papier, a été menée dans 14 territoires en France à partir de mai 2022.
C’est l’heure du bilan pour l’expérimentation « Oui Pub ». On connaît plus son contraire – « Stop Pub » ‒, cet autocollant à apposer sur sa boîte aux lettres lorsque l’on veut manifester son refus de recevoir des imprimés publicitaires non adressés. Lancé en 2004, Stop Pub visait à mettre fin à un gaspillage de papier de plus en plus décrié, alors que 760 000 tonnes de prospectus ont été distribuées en France en 2021. Une grande partie est jetée à la poubelle sans être consultée.
Mais Stop Pub a montré ses limites. Tout d’abord, son taux d’apposition sur les boîtes aux lettres est faible (autour de 17 % en 2020). Surtout, lorsqu’il est bien là, dans 57 % des cas, l’autocollant n’a pas permis une disparition totale des imprimés publicitaires, pointait un rapport de l’Agence de la transition écologique (Ademe) de février 2021.
Inverser l’approche avec Oui Pub
D’où cette volonté de revoir l’approche, quitte à l’inverser. C’est tout l’esprit de Oui Pub qui consiste à interdire la distribution de ces imprimés publicitaires non adressés, sauf dans les boîtes aux lettres sur lesquelles un autocollant Oui Pub a été collé. Ce dispositif n’existe pas encore à l’échelle nationale mais est testé depuis le 1er mai 2022 dans 14 collectivités qui se sont portées volontaires*. L’expérimentation prendra fin le 1er mai prochain, mais le gouvernement a déjà remis son rapport d’évaluation en octobre dernier au parlement et vient de le publier.
Premier constat : l’apposition de l’autocollant Oui Pub sur les boîtes aux lettres est très variable d’un territoire à l’autre. Les taux vont de 0,33 % à Bordeaux (Gironde) à 18,42 % pour la communauté urbaine de Dunkerque Grand Littoral (Nord). Est-ce dire qu’il y a si peu de Français attachés à recevoir des publicités non adressées ? Pas si vite. Une des limites du Oui Pub ‒ qui existe aussi avec Stop Pub ‒ est que l’existence de ces autocollants n’est pas toujours bien connue. La connaissance estimée de l’expérimentation Oui Pub par les habitants concernés variait ainsi de 25 % à 77 % selon les territoires avec une moyenne à 50 %, indique le rapport gouvernemental.
Des réductions importantes de déchets papier
Les 14 territoires pilotes disent également avoir constaté, dans l’ensemble, le respect des règles du dispositif Oui Pub. Les quelques manquements relevés sont des « imprimés concernant des petits commerces locaux non couverts par les dérogations », pointe le rapport. Résultat : ces territoires ont constaté des réductions importantes des tonnes de déchets papier collectés au cours de l’expérimentation. Entre 20 % et 70 % selon les endroits avec une baisse moyenne de 48 %. Et cette baisse s’explique bien, en partie du moins, par celle des imprimés publicitaires. Leur part dans le total des déchets papier collectés sur ces 14 territoires est passée d’une fourchette initiale comprise entre 17 % et 40 % à une fourchette entre 5 % et 19 % pendant l’expérimentation.
Mais faut-il attribuer tous les lauriers à Oui Pub ? Si la baisse des volumes d’imprimés publicitaires est plus marquée dans les territoires pilotes, cette diminution se vérifie partout en France et a commencé avant l’expérimentation Oui Pub. Le volume est ainsi passé de 900 000 tonnes en 2019, à 766 000 tonnes en 2021 puis à environ 400 000 tonnes en 2022 et 2023. Dès la crise sanitaire, marquée notamment par l’envolée des coûts du papier et de l’énergie, une grande partie des annonceurs ont commencé à transiter vers des modes de consommation numériques. Oui Pub n’a fait qu’accélérer un peu plus cette tendance.
Une transition vers la pub numérique pas toujours gagnante
Mais cette transition ne se traduit pas forcément par une baisse des impacts environnementaux. Car le numérique n’en est pas exempt, et génère notamment des émissions de gaz à effet de serre. Elles sont principalement liées à la fabrication des appareils numériques (ordinateurs, smartphones, tablettes…) et donc à la fréquence à laquelle on les renouvelle. Elles sont liées également aux consommations d’énergie qu’impliquent nos activités numériques (lire une vidéo, consulter une page web…) et toute l’infrastructure nécessaire derrière (serveurs, data centers…). Entre la communication papier et la communication numérique, les impacts sont ainsi différemment répartis, note le rapport gouvernemental qui estime les paramètres trop variables pour pouvoir conclure qu’un support est toujours plus vertueux que l’autre. Qu’elles soient numériques ou papier, le rapport appelle les annonceurs à une nécessaire recherche de sobriété et à l’écoconception des campagnes commerciales.
Des déçus du Oui Pub ?
L’autre biais de cette transition de la publicité du papier vers le numérique est qu’elle laisse de côté toute une partie des consommateurs éloignés du numérique. Si, dans les territoires pilotes, les habitants se disent à 44 % satisfaits de l’expérimentation et à 63 % pour son extension à toute la France, Oui Pub a tout de même fait des mécontents. Notamment parmi ceux à avoir mis l’autocollant sur leur boîte aux lettres. Certains ont malgré tout regretté une baisse des imprimés publicitaires alors qu’ils considèrent ces prospectus importants pour faire des économies dans un contexte inflationniste, pointe le rapport du gouvernement.
- Ville de Bordeaux, Smicval (Syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation) Libournais Haute Gironde, agglomération d’Agen, Communauté de communes Leff Armor, Communauté urbaine de Dunkerque Grand Littoral, ville de Sartrouville, Troyes Champagne Métropole, Métropole du Grand Nancy, Grenoble Alpes Métropole, Sytrad (Syndicat de traitement des déchets Ardèche-Drôme), Sictoba (Syndicat intercommunal de collecte et traitement des ordures ménagères de la Basse Ardèche), Communauté de communes Vallée de l’Ubaye Serre-Ponçon, Univalom (Syndicat mixte de traitement et de valorisation des déchets), Syvadec (Syndicat de valorisation des déchets de la Corse).
Lors d’un achat en ligne, l’option CB est souvent proposée comme alternative à Visa ou Mastercard. Un choix qui peut s’avérer judicieux.
« Le made in France, c’est mieux si on paye in France. » La campagne, siglée CB, déployée ces derniers mois par affichage et dans la presse, a de quoi interpeller. D’abord parce qu’on ne sait pas forcément qu’un choix s’offre à nous au moment de faire un achat en ligne par carte bancaire. Ensuite parce que le slogan laisse penser qu’on pourrait, à cette occasion, faire preuve de patriotisme économique. Qu’en est-il exactement ?
Sur les quelque 110 millions de cartes bancaires qui circulent en France, 77 millions portent le logo CB, elles sont dites « cobadgées » avec Visa ou Mastercard. Ce pictogramme est la marque du groupement d’intérêt économique (GIE) Cartes bancaires, mis sur pied en 1984 par les principales banques françaises. Lorsqu’on procède à un paiement en ligne, on ne remarque pas toujours ce logo alors qu’il est fréquemment présent. Ceux de Visa ou MasterCard nous étant plus familiers, nous avons généralement tendance à cliquer dessus. Alors qu’il est possible d’opter pour le réseau national dès lors que l’on possède une carte cobadgée.
Si le GIE Cartes bancaires attire aujourd’hui l’attention sur ce point, c’est qu’il se sent menacé par la concurrence. Pendant longtemps, les paiements passant par son réseau sont restés ultradominants en France. Mais ces derniers temps, plusieurs banques, notamment les néobanques, ont renoncé au cobadging, ne permettant que les paiements via le réseau Visa ou celui de Mastercard. Un virage que n’apprécient guère les commerçants, car les commissions exigées par ces derniers sur chaque achat sont beaucoup plus élevées que celles imposées par le réseau CB. Selon notre confrère Les Échos, la différence pourrait aller de 1 à 10 !
Coûts répercutés sur les prix
En novembre dernier, Ecommerce Europe, organisme représentant les intérêts des commerçants en ligne dans l’Union européenne, a publié un communiqué déplorant qu’au vu de leur position dominante, Visa et Mastercard se permettent d’imposer des augmentations « substantielles et régulières des commissions, certains commerçants importants pointant une hausse supérieure à 75 % entre 2016 et 2021, sans que cela reflète une augmentation des coûts ou des risques » pour les réseaux. L’association réclame une transparence sur les prix et une justification des augmentations, remarquant que la France est un des seuls pays en Europe à pouvoir échapper à cette hégémonie des deux mastodontes, grâce à l’existence du réseau CB. Pour les consommateurs, circonscrire le montant des commissions dans des limites raisonnables est également impératif. Car ces coûts supplémentaires imposés aux commerçants sont inévitablement répercutés sur les prix des marchandises ou services. C’est en cela que choisir le logo CB peut s’avérer pertinent, sachant que si certaines assurances sont liées à une carte bancaire (en cas de voyage en particulier), le fait d’opter pour un réseau ou l’autre ne change rien.
Il y a les animaux que l’on câline et ceux que l’on mange. Dans son dernier ouvrage de référence, Attachements, enquête sur nos liens au-delà de l’humain, l’anthropologue Charles Stépanoff (1) analyse l’évolution des liens que nous entretenons avec les animaux et notre environnement. Éloignés des lieux d’élevage dont nous sommes dépendants, nous fermons les yeux sur la réalité de cette économie. Loin des yeux mais près du cœur, nous voulons pourtant le bien-être animal. Quitte à l’enfermer dans les zoos pour mieux le protéger…
Durant les cent dernières années, qu'est-ce qui a le plus changé dans les relations entre l'être humain et les animaux?
Les animaux ont presque disparu de nos vies. Si on regarde les fermes de nos grands-parents, on voit qu’ils vivaient avec de nombreux animaux, pas uniquement des chiens et des chats, mais par exemple en compagnie du cochon, qui était présent dans la ferme, qu'on nourrissait tous les jours, avec des plantes récoltées le long des chemins. Il y avait le cheval de travail, les petits élevages de moutons, la basse-cour. C'était une communauté hybride qui assemblait des humains et de nombreuses autres espèces selon des liens complexes de travail, de production, de collaboration. Et ce n’était pas incompatible avec le fait d’entretenir une relation affective avec le petit cochon, traité comme un bébé. Puis, quand il était gros, on le tuait, on le mangeait, on le partageait. Toute cette richesse était fondée sur une autonomie alimentaire. Aujourd'hui, on est beaucoup plus dans le cadre d’une séparation, une forme de cloisonnement de notre relation aux animaux: d'un côté il y a les animaux qui nous nourrissent, et de l'autre les animaux que l'on aime. Nos animaux de compagnie sont des supports d'affects, tandis que les animaux "de production" sont vus comme une source de nourriture.
Nous serions donc moins concernés par notre environnement animal?
Quand on vit en ville, on peut avoir une relation riche avec un jardin, un parc, des pigeons qu'on va nourrir, des animaux de compagnie… Mais la dimension métabolique, l'approvisionnement, ont été transférés ailleurs. Nous avons camouflé et délégué tout ce qui fait que nous sommes dépendants de notre milieu vivant, en le confiant à l’industrie alimentaire.
Pourquoi nous est-il plus difficile d’abattre un animal domestique qu’un animal sauvage?
Parce que nous sommes des prédateurs empathiques: les humains sont incontestablement les plus grands prédateurs de la planète, mais à la différence du loup ou du tigre, ils sont capables d’avoir des émotions pour l’animal qu’ils tuent, d’être éblouis par la beauté d’un cerf, d’éprouver de l’affection pour une vache. C'est un paradoxe qui n'a pas été résolu avec la domestication. Raison pour laquelle on ne va pas consommer sa viande tout seul. Tuer un cochon était un acte collectif dans la paysannerie. On le partageait, c’est-à-dire qu’une famille donnait un jambon à son voisin, qui le lui rendrait à son tour lorsqu’il abattrait sa propre bête. Ce qui distingue les humains, c'est cette notion de partage. "Ce sont les lions qui mangent tout seul", disent d’ailleurs les peuples San d’Afrique du Sud!
Quel est alors l'équilibre entre empathie et prédation?
Chaque société humaine essaye de le trouver, et ce n’est pas évident. Il n’y a pas de solution unique chez tous les humains. Chez certains peuples, cela se traduit par des rituels d'excuses aux animaux et aux arbres qui sont abattus. Ce sont des règles éthiques de modération établies afin d’éviter le gâchis. On éprouve de la compassion pour l'animal qu'on mange, mais on ne veut pas qu’il soit mort pour rien! Une autre manière, la plus répandue aujourd’hui, consiste à cacher l’affaire, en camouflant l'acte de violence et en le confiant aux ouvriers travaillant dans les abattoirs. L’abattoir a été une façon moderne de résoudre le problème du prédateur empathique. C'est le lieu où l'humain exerce en cachette sa prédation sur des animaux qu'il a élevés lui-même.
Mais nous affirmons pourtant nous soucier de plus en plus du bien-être animal…
Cette question du bien-être animal est à double tranchant, parce que bien souvent, c'est un argument utilisé par l'industrie pour rendre acceptable l’élevage industriel. On fait des efforts pour accorder un demi-mètre carré de plus pour le cochon… Les cahiers des charges des abattoirs, par exemple, sont aujourd’hui très bureaucratiques et favorisent l'industrie. Dans toute la France, des abattoirs municipaux sont devenus non viables économiquement, car ils n’arrivaient pas à suivre ces exigences sur le plan réglementaire. Ce n'est pas forcément un gain pour les animaux, car cela implique plus de transports alors qu’auparavant, ils pouvaient être abattus sur leurs communes. Les bêtes parcourent ainsi des centaines de kilomètres, dans des camions, dans des transports intercontinentaux, maritimes, ce qui constitue une source de stress terrible pour elles.
Sur le terrain, la cohabitation des loups avec l'élevage moderne est-elle une utopie?
Elle est effectivement difficile. J'ai travaillé assez longtemps en Sibérie, où j'ai mené des études sur le sujet. Là-bas, ça coexiste bien! La raison en est simple: le loup n’a jamais disparu et n’a pas été réintroduit, comme c’est le cas chez nous. Surtout, les éleveurs ont le droit de se protéger face à un loup qui fait des dégâts. Certains loups posent problème, d'autres non. Les éleveurs en Sibérie n'éprouvent pas de haine envers le loup en général. Au contraire, puis qu’ils le considèrent comme un animal sacré. Mais s’il prend trop de brebis ou d'agneaux, l’éleveur a le droit de le tuer. C'est un droit de légitime défense. Ce qui n’existe pas chez nous, et que réclament nos éleveurs. Je pense que si ce droit existait, cela pourrait en réalité pacifier ces relations, parce que les éleveurs d’aujourd’hui ont l'impression de subir une contrainte qui leur est imposée par les gens des villes.
L'évolution des zoos permet aujourd'hui de sauver des espèces en voie de disparition.
On en vient donc à enfermer les animaux pour les protéger…
Le zoo a toujours joué un rôle important dans la connaissance des animaux. La ménagerie du jardin du roi, devenu muséum d'histoire naturelle à Paris, sous l'Ancien régime, était un lieu de collection des animaux. Il a permis d'étudier leur anatomie, mais il a aussi eu un rôle de conservation. On a pu le voir par exemple avec le cheval de Przewalski, considéré comme un cheval sauvage et qui a été conservé uniquement dans les zoos. S’il a pu être réintroduit en Mongolie, c'est grâce aux zoos et notamment au Jardin des plantes à Paris. Ces endroits jouent donc un rôle scientifique tout à fait important, mais aussi un rôle pédagogique pour faire prendre conscience aux enfants de la richesse de la faune. Le zoo, contrairement à ce que l’on pourrait penser, est promis un bel avenir.
- Charles Stépanoff est anthropologue, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales et cofondateur de l’École paysanne de Lignerolles.
À lire: Attachements, enquête sur nos liens au-delà de l’humain, éditions La Découverte, 640 pages, 27 euros.
https://www.google.com/search?q=Attachements%2C+enqu%C3%AAte+sur+nos+liens+au-del%C3%A0+de+l%E2%80%99humain&rlz=1C1GCEA_enFR1044FR1044&oq=Attachements%2C+enqu%C3%AAte+sur+nos+liens+au-del%C3%A0+de+l%E2%80%99humain&gs_lcrp=EgZjaHJvbWUyBggAEEUYOTIJCAEQLhgNGIAEMgcIAhAAGO8FMgoIAxAAGKIEGIkFMgcIBBAAGO8F0gEHNjE0ajBqN6gCALACAA&sourceid=chrome&ie=UTF-8
Comprendre la philosophie des nomades de la cité de Pétra en Jordanie. Expérimenter la vie des indigènes équatoriens. Ressentir la ferveur des Bahianais en pleine élection ou éprouver la sobriété des moines bouddhistes qui font vœu de silence… Et par-dessus tout, prendre un aller sans retour pour La liberté. Autant de raisons qui ont poussé Roberto Garçon, tout juste auréolé du succès de ses premiers documentaires diffusés dans Envoyé spécial et que d’aucuns désignaient déjà comme l’étoile montante du journalisme, à partir "Loin d’ici".
Pas au bon endroit
"J’étais fier, heureux et reconnaissant envers ceux qui m’avaient laissé cette chance. D’autant que mon envie de réussir a été aiguisée par le fait que mon parcours sentait le RSA de ma mère et le HLM de ma grand-mère. J’avais peu de chances de devenir journaliste à Paris, dans cet entre-soi si particulier. Et j’y suis arrivé. Mais il n’y a pas eu ce déclic qui dit: c’est bon, tu es à l’endroit qu’il faut. Lorsqu’on me demandait comment ça allait, je finissais par caler ma réponse sur le sujet que j’étais en train de faire, selon le succès qu’il remportait! J’étais devenu prisonnier du mythe de Sisyphe."
C’est son corps qui l’alerte en premier lieu sur ce mal-être: "En un an et demi de journalisme télé, j’avais pris vingt kilos… À 23 ans, c’est beaucoup! J’ai d’abord décidé de me réapproprier mon corps, cela m’a pris six mois. Et puis, il y a eu cette citation de Rosa Luxembourg: « Celui qui ne bouge pas ne sent pas ses chaînes" qui a rendu évidente la nécessité de se réveiller. De bouger. Et pour moi, le mouvement, c’est le voyage. C’est l’aventure. » Au grand dam de sa maman, qui ne comprend pas au départ pourquoi Roberto envoie tout valdinguer. "Et après, elle a eu cette phrase qui m’a énormément aidé: de toute façon, si tu fais un burn-out, ça va te coûter encore plus de temps dans ta vie. "
Claque magistrale
Un mois plus tard, à la manière de l’un des héros qui peuplent son imaginaire, Joseph Kessel, ou Jack London tout aussi désireux de s’échapper de certaines matrices, le jeune homme s’embarque donc pour la Jordanie. Avec un compagnon de route nommé Marvin. "Je rêvais de voir Petra et le désert du Wadi Rum. En me documentant, j’ai découvert que la Jordanie avait bien plus à offrir que cela: le nomadisme. Pour moi qui étais en quête de liberté, elle m’est de ce fait apparue comme étant l’endroit idéal. Grâce à cette possibilité d’être en mouvement, de passer d’un endroit à l’autre. Et j’ai essayé d’écrire le livre de la même manière dont j’avais voyagé, dans une sorte d’abandon absolu aux choses, aux événements et aux personnes que je rencontrais. " Mais confrontées au principe de réalité, les intentions les plus belles se heurtent parfois à l’inattendu. Lorsque sa quête se mêle à d’autres existences, et que pour comprendre sa réalité, il doit saisir celles des autres. "Le premier coup de massue, ça a été la rencontre avec Egop sur sa montagne. Alors que ce nomade incarnait à mes yeux la liberté, il m’a fait comprendre qu’il était prisonnier de sa solitude. Mais la claque magistrale, je l’ai reçue de Souleymane, un Berbère, dans le désert. Dans cet environnement rêvé, presque imaginaire, fantasmagorique, même. C’est là, lors d’une discussion le soir au coin du feu, que j’ai découvert que mon paradis était sa prison et ma prison son paradis. En tant qu’Occidental qui peut voyager, c’était très naïf de penser qu’il suffisait de partir pour être libre."
La déconstruction de ses a priori se poursuit en Amazonie "C’est vraiment à ce moment-là que je me suis dit: ce délire de voyager pour mieux se connaître revient à pouvoir s’autoriser un luxe énorme. On peut très bien se connaître sans partir de chez soi. On peut aussi partir six mois et revenir encore plus bête qu’avant, si on ne regarde pas les choses avec lucidité. Même si je ne donne de leçon à personne."
C’est au cœur de cet enfer vert, aussi beau que dangereux, où il découvre que ceux qui y vivent sont prêts à mourir pour vivre un peu mieux, qu’il va éprouver sa transformation la plus radicale. Même s’il séjournera autant de temps au Brésil dans la foulée et bien davantage en Thaïlande, l’Amazonie demeure son expérience la plus marquante. C’est là où le cœur de Roberto est resté, puisque tous les bénéfices de son livre seront reversés à la petite communauté indigène au sein de laquelle il a vécu plusieurs mois.
Pour revenir métamorphosé, affranchi désormais de tout dogmatisme, au sortir de ce périple au bout de lui-même. De cette exploration brute et sincère d’autres réalités, que l’on brûlerait de voir adaptée sur grand écran, tant sa lecture nous chavire, nous invite à la réflexion. Et dont on ne ressort pas indemne.
son compte Instagram
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Loin d’ici, en quête de liberté. Roberto Garçon. Éditions Partis pour. 232 pages. 25 euros.
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A noter que ses expositions photos croisées "Partir" et "Boréalis" sont présentées jusqu’au 3 janvier à la Maison des ensembles à Paris.
De prime abord, on pourrait penser que le sapin artificiel, utilisable plusieurs années, émet beaucoup moins de gaz à effet de serre que le naturel. Mais quand on regarde en détail, rien n’est moins sûr…
C’est avec lui que commence Noël. Depuis fin novembre déjà, les sapins sont bien mis en évidence dans les échoppes, du petit fleuriste de quartier à l’hypermarché. Chaque année, il s’en écoule autour de 6 millions en France pour un prix moyen de 34 €. Autrement dit, un foyer sur cinq en achète un. Une tradition qui ne faiblit quasiment pas. Tout aussi stable est le ratio entre sapins naturels et sapins en plastique : les premiers accaparent chaque année autour de 85 % du marché.
D’un point de vue environnemental, lequel des deux présente la meilleure empreinte carbone ? On pourrait se dire que l’artificiel part avec un net avantage en pouvant être conservé d’une année sur l’autre. Mais c’est bien souvent son seul atout. Car il est très majoritairement fabriqué en plastique (un dérivé du pétrole, donc) et en Asie, ce qui pèse lourd sur son empreinte carbone.
8,1 kg de CO2 pour le sapin artificiel
En 2009, le cabinet de conseil québécois spécialisé en développement durable Ellipsos publiait l’analyse du cycle de vie d’un sapin naturel et d’un sapin artificiel. L’exercice consistait à calculer l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre qu’ils génèrent tout au long de leur existence, de leur culture jusqu’à la gestion de leur fin de vie. Ellipsos prenait comme hypothèse que le naturel avait poussé dans un rayon de 150 km autour de Montréal où il avait été acheté. Bilan : 3,1 kg d’équivalent CO2 (eqCO2) par sapin, à racheter chaque année. Du côté de l’artificiel, produit en Chine et acheminé à Montréal par bateau puis train, le bilan était plus lourd : 48,3 kg eqCO2 par sapin, mais que l’on peut garder plusieurs années. En faisant l’hypothèse que le sapin était conservé 6 ans, le cabinet estimait alors 8,1 kg eqCO2/an pour l’artificiel.
Dans son guide pour organiser un Noël plus écolo (1), l’Agence de la transition écologique (Ademe) ne bannit pas le sapin en plastique, à condition seulement qu’il soit gardé longtemps pour compenser les impacts liés à sa fabrication et son acheminement. Or, en moyenne, les sapins artificiels sont gardés 8 ans, pointait déjà l’agence en décembre 2022. Il faudrait au moins le double pour qu’il devienne avantageux par rapport à un sapin naturel en termes de bilan carbone.
Privilégiez le sapin naturel local
Avantage donc au sapin naturel, avec ses 3,1 kg eqCO2. Pas si surprenant. « En moyenne, de la graine à son abattage, il s’écoule 10 ans, dont classiquement 5 à 6 ans passés en plein champ », explique Vincent Houis, ingénieur et conseiller technique à l’Association française du sapin de Noël naturel (AFSNN). Or, pour grandir, comme n’importe quel arbre, le sapin absorbe du CO2‒ ingrédient clé de la photosynthèse ‒ et le garde captif même une fois abattu, à moins qu’on le brûle. »
Selon une étude danoise de décembre 2022, le Nordmann, espèce emblématique du pays, aurait même un bilan carbone négatif jusqu’à son arrivée en point de vente, où qu’il soit en Europe. Il aurait, sur cette première partie de sa vie, absorbé 0,6 kg de CO2. Ce n’est qu’ensuite que les émissions passeraient dans le positif, en particulier lors du transport du sapin de son point de vente jusqu’au foyer où il passera les fêtes. Si le consommateur parcourt 10 km dans une voiture à essence pour le récupérer, alors l’impact carbone du sapin, sur l’ensemble de sa vie, s’élèvera en moyenne à 2,6 kg de CO2, calcule l’étude danoise.
Précisons tout de même que cette dernière a été commandée par l’association de producteurs de Nordmann danois, très tournée vers l’export, et que ses conclusions l’arrangent bien. En France, 20 % en moyenne des sapins naturels achetés chaque année sont importés. Essentiellement, justement, des Nordmann venus du Danemark et de Belgique. Une espèce cultivée aussi en France. On allège alors forcément l’empreinte carbone de son sapin en l’achetant local, au plus près d’où il a été cultivé.
Des cultures plus écoresponsables que d’autres
Mais la proximité est une chose. Les conditions de production influent aussi, pas seulement d’ailleurs sur l’impact carbone mais sur l’empreinte environnementale en général (biodiversité, pollution des sols, de l’eau, etc.). Sur ce point, Vincent Houis précise que, contrairement à une idée reçue, « les sapins de Noël ne sont pas prélevés en forêt, leur production n’est pas facteur de déforestation. Il s’agit d’une culture agricole, classée comme telle, et réalisée en plein champ, de la même façon que le blé, le maïs, la betterave… »
Entre 5 000 et 6 000 ha y sont consacrés, en France. À comparer aux 28 millions d’hectares de notre surface agricole utile (SAU), on ne peut pas dire que la culture du sapin soit expansive… En revanche, la majorité des 200 producteurs sont en agriculture conventionnelle, méthode autorisant l’utilisation d’herbicides. « Les trois premières années seulement », tempère Vincent Houis.
Tout de même, pour éviter toute exposition, on peut se tourner vers les producteurs de sapins bio français. Ils sont onze à s’être regroupés dans l’association Les Sapins bio de France, lancée après le Covid. Leur production labellisée AB est ainsi certifiée « sans aucuns traitements phytosanitaires, engrais chimiques, pesticides, hormones de croissance ». D’autres marques et labels existent (Plante bleue, MSP, Label rouge), mais ils sont moins ambitieux.
Neige artificielle et colorations à proscrire
Voilà côté producteur. Mais l’empreinte carbone de son sapin dépendra aussi de la façon dont on le traite chez soi. À éviter, par exemple, les colorations et le saupoudrage de neige artificielle. Ainsi recouvert de produits chimiques, le sapin n’aura d’autre choix que d’être incinéré avec les ordures ménagères, met en garde l’Ademe. La moins pertinente des fins de vie, à égalité avec celle de le brûler dans le jardin, interdite au passage (comme tout déchet vert, sous peine d’amende). À la rigueur, le sapin coupé en bûche pourra servir à alimenter son chauffage au bois. « Mais les résineux s’y prêtent mal, rappelle Vincent Houis. Ils brûlent vite et ont ainsi un faible pouvoir calorifique. »
Les fêtes finies, mieux vaut déposer son sapin en déchetterie ou dans un point de collecte dédié. Le plus souvent alors, il est composté ou broyé, les copeaux servant de paillage pour retenir l’eau au pied des arbustes ou les protéger du froid. La meilleure valorisation en fin de vie, notamment d’un point de vue carbone. Mais rien ne vous empêche de retarder le plus possible ce moment fatidique. Les sapins se trouvent désormais facilement vendus en pot, avec leurs racines. Si vous avez la main verte et que vous le cajolez bien (en le rempotant régulièrement), il pourrait très bien vous accompagner plusieurs Noëls. Son bilan carbone n’en sera que plus réduit.
Le fabriquer soi-même ?
Un sapin artificiel peut être fabriqué à partir d’autres matières moins carbonées que le plastique. On voit de plus en plus de sapins en bois dans les jardineries par exemple. Rien ne vous empêche non plus de fabriquer vous-même votre sapin artificiel à partir de matériaux récupérés. Sur les réseaux sociaux, plusieurs vidéos donnent ainsi quelques idées et conseils. On en trouve fabriqués avec des chutes de bois mais aussi des bouteilles, un escabeau, une pile de livres… Environnementalement, il n’y a pas mieux !
Ne pas faire du sapin écolo l’arbre qui cache la forêt
Enfin, s’il est louable de chercher à avoir le sapin de Noël avec la plus faible empreinte carbone possible, il faut tout de même garder en tête qu’il ne représente qu’une part infime des émissions de gaz à effet de serre générées par les fêtes de fin d’année. Dans un rapport paru en décembre 2022, l’Ademe les a passées en revue. Le sapin est rangé dans la catégorie décoration qui ne compte, elle-même, que pour 2 % dans le bilan carbone de ces fêtes. L’essentiel des émissions est généré par l’alimentation (15 %), les déplacements (25 %) et surtout les cadeaux (57 %). C’est bien sur ces postes qu’il faut agir en priorité.
Quelle implication des habitantes et habitants dans le Parc naturel régional des Préalpes d'Azur ?
🖐️ Habitantes et habitants du Parc naturel régional des Préalpes d’Azur, nous vous sollicitons pour répondre à quelques questions (15 minutes) sur votre relation au territoire des Préalpes d'Azur.
🗺️ Entre mars et juin 2024, un premier questionnaire a été diffusé pour faire le bilan citoyen de l'évolution du territoire et des actions du Parc. Merci aux 207 participants et participantes. Retrouvez les résultats de ce premier questionnaire ici :
Réponses brutes – questionnaire bilan citoyen 12 ans de territoire PNR
https://www.parc-prealpesdazur.fr/wp-content/uploads/2024/01/Reponses-brutes-Questionnaire-bilan-citoyen-12-ans-de-territoire-PNR1.pdf
Résultats analysés – questionnaire bilan citoyen 12 ans de territoire PNR
https://www.parc-prealpesdazur.fr/wp-content/uploads/2024/01/Resultats-Analyses-du-Questionnaire-bilan-citoyen-12-ans-de-territoire-PNR-mis-en-page.pdf
nouveau questionnaire
Ce nouveau questionnaire a pour objectif de mieux connaitre les souhaits des habitantes et habitants pour l'avenir du territoire et pour l'implication des citoyens et citoyennes auprès du Parc aturel régional des Préalpes d'Azur
https://www.evalandgo.com/f/169841/4pjTh2zR6FnxcxDhHrDyVk?o=1805b77981a7bc
“Go paperless, save trees”. Is that really the case? According to this popular motto, documents in digital versions are environmentally sounder than their old-school, paper counterparts. It may be easy to think so since we’re quite aware of the link between a tree and our notebook. Yet the largely hidden life cycle of electronic devices, from production through powering to disposal, adds up to their environmental impact. Accounting for the supply chain of electronic appliances may well disqualify digital as the ‘greener alternative’. Besides, the paper has the potential to contribute to carbon-storing while the digital is limited in this regard.
The comparison is context-dependent in a twofold way. The producer’s environmental choices can have a great impact on the sustainability of the final product, either paper or digital. Besides, the variations in the environmental footprint mean that you can assess what’s more environmentally friendly in a particular situation. We hope that this article will give you a starting point for critically evaluating both options. We will be comparing the environmental footprint of a 20-page article, printed on a standard office printer or displayed on a 17-inch screen laptop.
Bio-based versus toxins: the production process
Let’s start backstage. What does it take to produce a paper and a digital article? The brainpower of the author aside: how did this article end up on your desk?
If you’re reading the paper version of our imaginary document, the white pages in front of you were likely a living part of a forest not so long ago. It takes over 8 trees to produce 100,000 sheets of paper, generating a carbon footprint of 6,000 kg of CO2 equivalents. Our 20-page article is likely to have a carbon footprint of 1.2 kg, coming only from the energy used to produce the pages. The act of printing has a negligible energy impact (order of magnitude <0,001 kg-CO?eq. / page).
The production of 20 sheets of paper takes up 6.4 L of freshwater, which adds an extra 0.65 kg of carbon footprint to the 1.2kg value from energy use in production. Since energy and water footprints together form the bulk of the product’s carbon footprint, we can make a ballpark estimation for our paper article’s total carbon footprint. Producing and printing the 20-page document has a carbon footprint of approximately 1.85 kg.
Freshwater used in paper production makes a strong case for the need for recycling. Image source
While the energy from the act of printing is negligible, the carbon footprint of producing the printer isn’t. The data on the energy and water use to produce a single printer is extremely scarce, yet an environmental report of a large printer producer shows their overall environmental impact for 2019 at 46,785,800 t of carbon dioxide. This value includes the production of printers (material extraction, capital goods, energy production, and transportation), facilities, and product use. The production-to-use carbon footprint ratio is 50 to 49, which means that we need to count the negligible singular energy impact of printing the 20-page document as double.
If you went for the digital version of our article, we first need to account for the appliance that allows you to read online: your imaginary 17-inch screen laptop. Manufacturing one laptop causes the carbon dioxide emissions of between 227 to 270 kg from energy use. The energy used in the process constitutes 70% of the energy consumption of the whole lifespan of the device. Accounting for the water usage—a conservative estimate of 6,500 liters per laptop—adds an extra 655.2 kg of CO2 emissions. In total, producing a laptop creates a carbon footprint of between 882.2 kg and 925.2 kg.
Considering the average lifespan of a laptop at four years put the annual carbon footprint of a laptop owner at between 220.6–231.3 kg. If we assume that you use your laptop for 6 hours a day, 5 days a week (1,350 hours yearly for 45 working weeks), your laptop’s carbon footprint embedded in production equals approximately 0.25 kg of carbon dioxide per hour. Assuming that it takes between 64 and 80 minutes to read a 20-page article, the carbon footprint for reading equals 0.27–0.3kg.
Most of the emissions come from extracting the necessary materials, and carbon footprint is not the only environmental issue here. Any laptop—and electronic device in general—contains rare earth metals as well as toxic substances. The current status quo of extracting minerals and chemicals is harmful to both the environment and the workers. Laptops contain lead in their batteries, and some LCD screens contain mercury. Many of these chemicals end up in the environment already during production, and especially once they’re disposed of.
The majority of global laptop production is located in China. With its lax environmental regulations and low accountability for workers’ rights, China produces quickly and cheaply, with a massive drain on socio-environmental sustainability. Unless you own a new laptop from a hyper-conscious, ethical brand (or a second-hand one), with the appropriate certification, there is a fair chance that your laptop was part of the chain of social and environmental abuse.
Footprint per hour: the implications of the use
For laptops, the carbon footprint increases proportionally to the time that you spent on reading. Paper copy emissions originate only from the time the document was printed and remain stable until their recycling.
A 17-inch laptop screen has a carbon footprint of approximately 23.4 g per hour of reading. Therefore, assuming the reading time is between 64 and 80 minutes, the emissions from the reading would equal 25–31g. The energy consumption varies greatly among electronic devices: it is lowest for single-purpose reading devices such as Kindle and increases steadily through tablets and laptops to reach the highest in computer screens and desktops.
Single-purpose reading devices have the lowest environmental impact among electronic devices. Image source
The carbon footprint of the digital paper doesn’t end here. If you accessed the article online, your online pursuit activated several data centers. Websites are stored in data centers, too, so accessing a server consumes energy needed for running and cooling them. Admittedly, your single 20-page article won’t consume much—transferring 1GB of data takes approximately 5 kWh. Therefore, the emissions of a 1 GB transfer reach between 2 and 3 kg of carbon dioxide, depending on the energy efficiency of a power plant.
A 20-page document without images won’t surpass a couple of hundreds of kilobytes, so its emissions could be negligible. The size of a 20-page article can vary between 150–1250 kB, depending on the number of images, and the corresponding carbon footprint amounts to between 0.00034–0.0028 kg. Since this figure is relevant each time you open such an online document, you can prevent the increase of your carbon footprint by downloading the article you will need to read multiple times.
Yet, several billions of users all with a ‘negligible impact’ add to about 2% of global electricity use that the data centers currently take up. At this point, data centers contribute to 0.3% of global carbon emissions. Predictions show an increase in energy use to 8% of the global total in 2030.
Afterlife, only overseas
How your product ends its life has an important effect on its overall environmental footprint. The effort you put into bringing your papers and laptops to a recycling point, repurposing them, or selling your laptop second hand, will have a tangible impact.
A sheet of paper can be recycled up to seven times. Recycling paper to its maximum capacity can drop its carbon emissions by 47%, from 6,000 kg per 100,000 sheets to 3,200. Europe recycles over 70% of its paper, and the figures are comparable worldwide. Making sure that your 20-page document is recycled to its maximum would reduce its carbon footprint from 1.85 kg to 0.87 kg. This value includes saving 2.65 L of freshwater.
The only emissions from deleting your digital file come from the energy used to power your screen. Yet what will happen with your laptop once you choose to get a new one has an impact significant enough to mention it for this case.
As you may remember, the greatest part of the carbon footprint from laptop production comes from extracting metals. Recycling a laptop means offsetting 50% of emissions that come into the production of a brand new laptop. The value reaches 75% for second-hand laptops. Yet in 2019, only 17% of the 54 million tons of e-waste was recycled, which puts the overall value at 9% for a new laptop from recycled parts and 14% for a second-hand one. Putting the effort in to sell your laptop second-hand, or to bring it to a genuine recycling point (which will require some research) significantly decreases your carbon footprint.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1876610217309554science direct
The amount of electronic waste rises three times faster than the world’s population, and 90% of it is dumped illegally. In 2019, we humans generated 54 million tons of e-waste: an equivalent to 7.3kg for every inhabitant of the planet. Alongside valuable metals inside of the electronic devices, there are some highly toxic ones. Often, it is the job of children and women in developing countries that host the piles of e-waste to retrieve valuable metals. This process of semi-recycling often turns out more harmful for both the retrievers and the environment, for example when the workers burn the laptops to retrieve copper.
The hidden potential of paper
While the ability to lower the carbon footprint of a laptop stagnates when we achieve 100% recycling, the paper has the potential to contribute to improving the overall carbon sheet by delaying emissions. Transforming trees into paper means temporarily storing the carbon that will be released into the atmosphere upon burning. A study in a Chinese mill paper showed that accounting for the carbon storage abilities of paper in a Life Cycle Assessment (LCA) shows the reduction in emissions by 24% over 30 years.
Combined with the paper industry’s ability to increase natural capital by replanting trees, the carbon storage capacity presents the industry with an opportunity to become climate positive.
‘It depends’? Some advice to counter relativity
The simple answer to the ‘digital vs. paper’ dilemma is: if you only scan through documents, it is more sustainable to read them online. If you will read it more than three times or you plan to pass it over to another reader, printing is the better option. The table below summarizes this finding.
Since the environmental footprint is context-dependent, try to account for your context before deciding on digital or paper. For example, if you host a meeting during which you will present some documents, think about how many people attend to understand how many paper copies you will have to print and contrast this with the amount of time you will keep a projector running. You can find the carbon estimates for such a scenario under ‘Sources & additional resources’.
Several rules of thumb apply to minimize your environmental footprint, no matter whether you go for digital or paper.
Try to maximize the lifespan of your laptop or your printed materials.
Circulate paper copies so that they serve more than one person.
Consider selling or donating your old device once you bought a new one.
Remember to make sure that your waste?—?either electronic or paper?—?is properly recycled.
Go for laptops rather than desktop computers due to their energy consumption, and opt for smaller screens.
Try to read offline and turn your device off when you don’t use it.
Researching sustainable paper plants can further decrease your environmental footprint.
Besides the multitude of contexts, the greatest difficulty for a systemic analysis of the environmental impact of digital versus paper copies is the lack of data available on the electronic appliances’ producers’ side. Cross-industry reporting standards on sustainable footprints would be a quintessential step, boosting transparency and allowing questions like these to be openly validated and answered.
Our analysis accounted only for the carbon emissions, not taking into consideration other sustainable boundaries such as environmental toxicity basis or macro-rare-resource use basis. We mention the boundaries in italics, hoping to further stimulate your interest.
Publié le 03 novembre 2024
Prescrits et délivrés en dépit du bon sens, médicaments et dispositifs médicaux inutilisés alourdissent absurdement le fardeau de la Sécurité sociale.
« Faut pas gâcher ! » Le gimmick de Guy Roux, un célèbre entraîneur de foot parodié par les « Guignols de l’info », avait beau faire sourire, nous sommes au fond tous d’accord avec lui : le gaspillage est une absurdité économique et écologique. Il s’avère encore plus désespérant quand il touche notre système de santé mal en point. Vos réactions l’ont montré après notre enquête révélant que, des années après leur date de péremption, la plupart des médicaments restent efficaces.
Ce constat fait écho à un autre, dressé par le syndicat Convergence infirmière : nos armoires à pharmacie familiales sont remplies de médicaments et de dispositifs médicaux qui finiront à la poubelle. Les raisons de cette gabegie sont multiples, selon Ghislaine Sicre, présidente de l’organisation : « Certains pharmaciens délivrent en dépit du bon sens, typiquement des boîtes de 90 comprimés tous les mois alors que le patient en prend un par jour, ou de quoi procéder à 6 piqûres quand 2 sont prescrites. Des personnels d’hôpitaux remplissent des ordonnances qui ne correspondent pas aux besoins, par exemple des pansements de 3 tailles différentes pour 1 seule plaie. Des organismes d’hospitalisation à domicile fournissent des boîtes inutiles. Les laboratoires proposent des conditionnements surdimensionnés, et les patients ne s’assurent pas toujours qu’ils n’ont pas déjà le médicament avant de passer le prendre à la pharmacie. »
Opération choc
Convergence infirmière a organisé, au printemps, une opération « Balance ton gaspi » à double détente. Temps1 : marquer les esprits en déversant des monceaux de boîtes collectées chez les patients sur les places de 9 villes. Temps 2 : étayer le propos et chiffrer les dégâts. Bilan ? « 1,5 milliard d’euros par an qui partent en fumée. À la Cnam1, ils étaient verts ! » affirme Ghislaine Sicre. Le syndicat a dressé la liste des médicaments et dispositifs médicaux champions du gaspillage. Parmi eux, on trouve des quantités astronomiques de compresses. Mais aussi des traitements contre le diabète, des lancettes ou des bandelettes de contrôle de la glycémie, du Seresta (anxiolytique) ou encore Macrogol, une poudre contre la constipation, dont l’infirmière estime qu’il pourrait être avantageusement remplacé par « de l’eau d’Hépar et des pruneaux ».
Solutions de bon sens
La Cour des comptes s’est saisie du dossier, tout comme l’Assurance maladie, qui doit désormais analyser les multiples causes du gaspillage afin d’espérer y remédier. De son côté, le syndicat a avancé quelques idées. Notamment, en ce qui concerne les pansements, il suggère que les professionnels de santé prennent l’habitude de limiter les prescriptions à 1 semaine et de s’appuyer sur les infirmiers pour la suite. Ou encore que l’on confie à ces derniers le soin, contre rémunération, de gérer au plus juste la pharmacie des patients âgés ou atteints de troubles cognitifs. « Il faudrait que les autres personnes vérifient régulièrement qu’elles n’ont pas déjà le médicament prescrit et que les médecins le leur rappellent au passage », insiste Ghislaine Sicre. Elle se dit aussi scandalisée par les rigidités entourant le don aux associations. « On a le droit de leur envoyer des dispositifs médicaux tels que les pansements, mais pas les médicaments, c’est illégal. Pourtant, ça s’est longtemps pratiqué, râle-t-elle. Une ONG ukrainienne nous a contactés. On ne peut hélas pas lui fournir les médicaments récoltés, même s’ils n’ont jamais été ouverts. Les pouvoirs publics préfèrent les faire brûler dans des incinérateurs. On marche sur la tête ! »
Était-il possible de mettre en place une vigilance météo infradépartementale et de décider de ne fermer les écoles qu’aux endroits les plus critiques? Au lendemain des intempéries qui ont une nouvelle fois frappé les Alpes-Maritimes et qui ont entraîné la fermeture des écoles, c’est aujourd’hui la
Antony Brunain est météorologue amateur depuis des années. Il est le fondateur et administrateur de la page Facebook Nice Météo. Et la mise en place des vigilances infradépartementales qui seraient plus ciblées fait partie des idées qu’il porte.
"C’est une évidence qu’il faut aujourd’hui se poser cette question. D’autant plus que ce genre d’épisodes est appelé à se reproduire. Et je suis persuadé que Météo France se la pose. La vigilance infradépartementale existe pour les risques avalanches et vagues subversives. Ceci dit, poursuit ce passionné de phénomène météo, c’est loin d’être si simple quand on parle du risque inondation…"
Pour Antony Brunain, la question aurait pu se poser mercredi: "Pour cette journée, on savait que le risque des intempéries serait ciblé sur l’ouest des Alpes-Maritimes ou l’est varois. Et c’est l’ensemble de ces deux départements qui a été mis par Météo France en alerte orange pluie inondations. Cela aurait été pertinent de n’avoir qu’une partie de ces deux départements en orange."
"Mais jeudi, à mon sens, c’était plus compliqué, poursuit-il. L’ensemble des Alpes-Maritimes était en vigilance rouge. C’est vrai qu’il n’a pas trop plu sur le littoral et du coup, les gens, surtout les parents, se sont posé des questions. Mais jeudi, le risque principal c’était la saturation des cours d’eau partout dans les Alpes-Maritimes. Cela aurait été très complexe d’exclure certaines zones. Météo France a donc placé tout le département en rouge. C’était à mon sens justifié, personnellement, à midi j’étais très inquiet sur le risque de crue… Même si je reconnais que fermer les écoles c’était lourd de conséquences, donc la question mérite quand même d’être posée."
Antony Brunain met aussi en avant qu’une vigilance météo infradépartementale plus affinée, "c’est aussi plus de travail en amont. Météo France en a-t-elle les moyens? Avec moins de budget et moins de monde, c’est peut-être un peu compliqué, avance-t-il… Et on connaît l’état de Météo France, en deux ans c’est 600 postes en moins et un budget amputé en raison de la baisse des subventions de l’État."
"L’autre question qui se pose aussi, poursuit Antony Brunain, c’est: est-ce qu’on peut décider d’une fermeture partielle des écoles? Peut-on dire on ferme dans les vallées et pas sur le littoral? Mais alors quelles vallées? Et quid des transports scolaires entre territoires? C’est une usine à gaz et tout cela nécessite un temps de réflexion énorme que les services de la préfecture n’ont pas car la décision de fermeture ou pas des établissements scolaires n’est prise qu’au dernier moment, selon les dernières prévisions, pour être la mieux justifiée."
Le système de sécurité chez VolksWagen.
Normalement, avec les régulateurs et les pilotages semi-auto, si le conducteur ne répond pas, ça se met à biper pour qu’il remette ses mains sur le volant.
Si le conducteur est trop distrait (ou dans l’incapacité de conduire car évanoui ou mort), il y a deux philosophies :
– la première : la voiture utilise tout ce qu’elle sait faire pour s’arrêter en sécurité. Elle change de voie, ralentit en tenant compte du reste du trafic, met les warnings, s’arrête sur la bande d’arrêt d’urgence (BAU) ou le bas-côté, appelle les secours.
– la seconde : la voiture désactive toutes les aides à conduite pour “punir” le conducteur et le forcer à reprendre la main.
VolksWagen, mais aussi Mercedes (de source sûre) et peut-être quelques autres aussi, ont choisi la première. La vidéo montre même que la voiture donne des coups de frein par a-coups (ou bouge le siège), et klaxone.
Hyundai, pour en avoir une, a choisi la seconde (mais ce sont sûrement pas les seuls : je pense que cette philosophie est la plus répandue, y compris parmi les véhicules qui pourraient techniquement faire comme VolksWagen ou Mercedes).
Chez Hyundai, et d’autres aussi, je suppose encore, après 15 secondes, ça se met à biper. Ensuite ça bip plus fort, et enfin ça désactive tout et la voiture de continuer comme si il n’y avait personne au volant (donc en l’envoyant dans le décors).
Pourquoi ?
Je l’ai déjà dit et je le redis : SI LE CONDUCTEUR NE RÉPOND PAS, TOUT COUPER EST BIEN LA DERNIÈRE CHOSE À FAIRE.
Ma voiture :
- sait détecter les voitures à 360°
- sait m’empêcher de changer de voie si elle détecte une voiture dans mon angle mort
- sait changer de voie
- sait ralentir jusqu’à l’arrêt
- sait mettre les warnings tout seul
- sait détecter le bord droit de la route (ou la glissière de la BAU),
- sait appeler les secours (en transmettant position GPS, nombre d’occupants, type de véhicule, type de problème etc.)
- …
Alors pourquoi ils ne le font pas ?
J’ai bien une idée : ils n’ont pas envie que les usagers se retourne contre le concepteur de ces systèmes si la tentative de sauvetage se passe mal, soit pour les passagers, soit pour les autres, soit pour la voiture. Je vois déjà des Karen gueuler parce que la voiture est rayée après avoir tapé dans glissière lors une tentative de sauvetage alors que Karen elle-même faisait une crise cardiaque.
Bref, de mauvaises raisons, le conducteur DOIT être tenu responsable dans tous les cas, point. Aides à la conduite ou pas, tentative de sauvetage ou pas. Après tout, dans une voitures sans les aides, en cas de situation incapacitante, le conducteur l’est aussi. Si c’est ça leur excuse (j’en suis à peu près sûr), elle est débile. Clairement.
Hyundai, ce sont des mecs qui refusent les idées des utilisateurs car ils n’ont pas envie de risquer d’avoir à payer des royalties sur les droits de cette idée.
Perso j’ai bien 50 idées d’améliorations très simples sur leur voiture, mais ils ne veulent pas en entendre parler. Ni les miennes, ni celles de personne. Les forums regorgent de gens qui ont proposé des choses, mais à chaque fois le même refus (ou absence totale de réponse).
Inversement, chez Tesla par exemple, les ingénieurs sont sur les réseaux et sur les forums pour aller à la chasse aux idées d’amélioration. Je suppose que d’autres marques font pareil (Porsche, peut-être ?). Deux salles, deux ambiances.
Ça ne leur est jamais venu à l’idée, je crois, de faire signer un papier où celui qui propose une idée leur laisse les droits. Pour ma part, je ferais ça avec plaisir, si ça me permettait d’en avoir le fruit via une mise à jour.
PS : oui j’aime beaucoup ce que fait Hyundai, mais 1) je n’adhère pas à leur philosophie sur certains points et 2) leur façon de voir leurs clients est déplorable et c’est celle du siècle dernier, avec d’un côté leurs ingé et leur sachoir infaillible, de l’autre les consommateurs dont OSEF des retours, suggestions, idées, remarques.
Inversement, je n’aime pas les marques allemandes (qui riment soit avec gros cons sur la route, soit avec #DieselGate)), mais je dois leur dire que leur façon de faire ici avec les aides à la conduite est la bonne méthode. Merci à eux pour ça.
Je vois passer des sites de calcul CO2 qui demandent de s’inscrire (myco2.com, par exemple). Laissez-tomber ces inepties.
Prenez celui-ci : https://nosgestesclimat.fr/
C’est celui proposé par le site du Service Public. Pas d’inscription, pas d’emmerdes. On répond au questions et on a le score à la fin.
Je suis à 5,9 t/an.
Un des constats à faire, c’est que certains postes font très vite évoluer le total (voyage en avion, repas avec de la viande, voiture thermique, chauffage au fioul ou au gaz, vivre à plusieurs sous le même toit ou vivre seul).
D’autres, on a beau les changer, le score ne change pas : qu’on achète 2 tshirt ou 12 tshirt, ou qu’on utilise son PC 20h par jour ou 2 heures, la différence est en grammes, éventuellement en kg. Certainement pas en tonnes.
Mon score relativement bas (la moyenne en France est à 8 t). s’explique par ça :
- pas d’avion
- tout est électrique (chauffage, voiture, cuisine, eau chaude…)
- très peu de viande (2x par semaine, et encore)
- peu d’électroménagers (pas de sèche linge, pas de lave-vaisselle, pas de télé…)
- consomme très peu en général (fringues, meubles…)
~
La grande force de la France en matière d’énergie et de CO2, c’est son électricité (très fortement décarbonée).
Si on électrifie au maximum nos vies, on gagne beaucoup. Pas juste sa voiture, mais surtout aussi le chauffage, la cuisine, l’eau chaude.
On le voit avec les électricity-map en Europe : la France est actuellement à 22 g/kWh, avec 99 % de décarbonée.
La Belgique est à 66 g avec 94 % de décarbonée.
L’Allemagne est à 227 g avec 81 % de décarbonée.
Ce que ça montre, c’est que seuls 5 % d’énergie fossiles suffisent pour tripler son CO2 (et en représenter 66 % du total). Passez à 20 % de fossile, et on multiplie les émissions par 10 (90 % du CO2 provient alors de seulement 20 % de l’énergie) : c’est insensé.
À la condition où l’énergie est décarbonée, comme en France, plus on électrifie, plus on décarbonise. Sans rien changer à son confort, passer à une cuisinière, un chauffe-eau et une voiture électriques, ça réduit déjà de ~1,5 tonne/an facilement.
Bien-sûr ne pas se chauffer et ne pas rouler c’est encore mieux, mais ça ça ne peut venir qu’après. Je pense que la technologie doit évoluer avant de faire changer les habitudes des gens. Ici, je ne considère pas que changer son chauffage ou sa voiture ne soit un effort à faire. Au final notre vie ne sera pas bouleversée : on fera les mêmes choses, juste avec du matériel différent.
Devenir végétarien, chasser les déchets, n’acheter que du local… ça par contre ça va demander de changer un peu son quotidien et ses habitude, et de travailler sur soi-même directement. C’est pas difficile, mais ça demande un effort. Et demander ça aux gens, c’est plus délicat. Ça ne viendra pas tout de suite.
Ce qui peut venir, ce qui est déjà là en fait, c’est la technologie.
Ça commence. Cette lib contient des informations linguistiques sur la fréquence des mots dans une langue. Un peu comme les tables de fréquence des lettres (qui disent que la lettre « E » est la plus courante en français, suivies de A, I, S, N, R…), mais pour les mots.
Cette lib cessera d’être mise à jour avec de nouvelles sources de textes utilisées pour calculer ça.
La cause : de plus en plus de textes sont générées par des IA, dont le contenu n’est pas celui des humains, et donc faussent les résultats.
D’autres causes de l’arrêt du support sont la fermeture des plateformes qui servaient de sources de mots (Twitter, Reddit…) et le bordel ambiant autour de l’IA générative qui dégoûte l’auteur…
~
On en est donc à un point où non seulement on doit faire attention aux IA sur le fond (le contenu peut-être crédible, mais inventé) mais aussi la forme sur le plan technique (le contenu utilise des mots autrement qu’un humain).
Le truc c’est que ces textes légèrement absurdes finissent par retourner dans les moteurs d’IA, qui se servent des données pour en produire d’autre. J’imagine que faire ça suffisamment de fois en boucle produira du charabia, autrement du bruit. Juste du bruit blanc de fond.
Elle s’appelle Théa Serfaty, elle est Niçoise, étudiante en communication à Paris et déjà fondatrice de Politique Médiatique.
Un média qui invite au débat public. "Sa volonté est d’être le porte-voix entre citoyens et industriels. Ouvrir la discussion sur des sujets sensibles où il est difficile aujourd’hui d’obtenir des réponses transparentes de la part d’industriels d’envergure."
Le premier débat organisé, depuis Paris, filmé et diffusé gratuitement sur la chaîne Youtube de Politique Médiatique, portait sur la mobilité de demain. Il a mobilisé Transdev, Flexibus et Trainline. Comment cela fonctionne-t-il? Un appel à questions est lancé via les réseaux sociaux et un algorithme va choisir les citoyens qui participeront au débat, tandis qu’un public d’une dizaine de personnes peut être invité sans pouvoir interagir.
https://www.youtube.com/watch?v=8Iuuvn_68h0
Le tabac ne sera plus tabou
"Nous sélectionnons un certain nombre de questions qui permettent de balayer le sujet et de mieux cerner ces industries. Le prochain débat est filmé ce 16 septembre. Il sera diffusé sous vingt jours. C’est une première: nous faisons venir quelques grands noms de l’industrie du tabac: Philip Morris, British American Tobacco et Seita Imperial Tobacco. Des questions sur la communication invisible à mener quand on vend du tabac, leur politique RSE, le plan santé, les taxations, l’avenir de l’industrie... Nous avons hâte."
Politique Médiatique est pour l’heure une association où tous les contenus sont proposés gratuitement « pour toucher tous les publics ». Transformer l’association en société et monétiser les vidéos sera peut-être envisagé plus tard. Politique Médiatique fait son petit bonhomme de chemin avec des teasers qui dépassent les 100.000 vues sur Youtube.
Objectif de Théa Serfaty? "Eclairer le citoyen en le faisant participer au débat et pourquoi pas essayer de changer le monde." Voilà. Sans filtre.
Hm. Perso j’y vois du positif. Les caméras peuvent largement aider à révéler la vérité sur un événement, quel qu’il soit. Et les images peuvent autant incriminer l’auteur d’un crime qu’innocenter une personne suspectée à tort.
C’est davantage pour cette raison que j’utilise une dashcam. Pas pour donner quotidiennement les vidéos aux flics, mais pour présenter la vidéo dans le cas où l’on me soutiendrait que je suis en tort alors que je ne le serais pas (par exemple).
Et je pense que toutes les sources de preuves doivent pouvoir être utilisées, tant pour la demande que pour la défense.
Maintenant, en France il y (selon moi) un flou autour de ces caméras. D’un côté, filmer l’espace public est interdit (que ce soit via une dashcam ou non, en voiture ou non). De l’autre, la Police utilise des vidéos de particuliers pour incriminer des contrevenants (par exemple l’affaire des kéké qui se filment à faire du 280 km/h sur autoroute), et puis prendre une vidéo de vacance dans l’espace public n’est pas interdit.
Il faut ajouter que les dashcam (Tesla je ne sais pas, c’est un peu spécial) enregistrent en continu (parfois même voiture éteinte), mais ne conservent pas tout éternellement. Les nouvelles données remplacent les anciennes.
C’est donc une captation temporaire, et la plupart du temps, sans exploitation.
À mon avis, cela mérite une clarification, pour les dashcam en particulier :
– est-ce que l’on peut les déroger au principe de non captation de l’espace public ?
– est-ce que ça peut servir de pièce à conviction (à la fois pour incriminer, que pour innocenter — l’un ne devra pas aller sans l’autre).
– si oui sous quelles conditions : définition minimale de l’image ? quelles infos doivent être incrustées (vitesse, coordonnées GPS…) ? quels modèles sont certifiés comme valant preuve ? quid de la question de la falsification des images ?
J’imagine qu’une carte SD donnée immédiatement aux FdO au moment d’un accident pourra raisonnablement être considérée comme « non falsifiée ».
– Comment les déclarer ? Je propose une ligne sur la carte grise, par exemple.
Il y a une grande disparité sur la question dans le monde. Certains pays les interdisent pour préserver la vie privée. D’autres les autorisent, mais interdisent la diffusion des images. D’autres les obligent (Corée du Sud, Russie…) car ils estiment que le rapport bénéfice pour les enquêtes/risque pour la vie privée est en la faveur de leur utilisation.
Bref, ça demande une étude approfondie de la question. Tout n’est pas blanc ou noir.
Concernant mon point de vu personnel : il ne me viendrait pas à l’esprit d’aller dénoncer tous ceux qui j’ai croisé en infraction, chaque jour, à la police. Quand bien-même ça serait rémunéré, quand-bien-même ma voiture était étalonnée en vitesse pour choper les excès (les véhicules de police le font) : ça ne se fait pas.
Maintenant si je suis témoin d’un accident qui se produit sous les yeux de la caméra, la question peut se poser.
Dans la condition où l’on me garantie aucune poursuite pour possession de la caméra et captation de l’espace public — d’où le nécessité qu’elles soient explicitement légalisées — je pourrais sans problème me présenter comme témoin avec la vidéo, si elle peut s’avérer utile. Mais qui suis-je pour juger de ça ?
Car si les différentes parties de l’accident sont d’accord entre elles et résolvent leur problème tout seul, tant mieux et pas besoin des témoins, encore moins des vidéos.
Mais si un abruti en Golf GTI grille un feu rouge et encastre une mamie, et qu’il commence à accuser la mamie, je n’aurais aucune honte, je dis bien AUCUNE honte, à témoigner pour dédouaner la mamie, en fournissant le support de la vidéo aux FdO et à la mamie (bien-sûr, les FdO feront leur propres conclusions d’après la vidéo, ça ne sera plus mon problème).
Cela ne m’est jamais arrivé, mais je connais des gens à qui cela est arrivé, d’être tombé face à des cons en tort et dont la vidéo a permis à la police de voir ce qui s’était réellement passé, et au final avoir pu faire entendre raison, notamment auprès de l’assurance. Bref, les exemples où la vidéo sauve la mise ne manquent plus. Et entre se faire rembourser par son assurance car on est victime, et perdre 6 points, son permis, sa voiture, son assurance, son bonus et tout et tout parce qu’on est réputé coupable.
Voir là : https://www.promarket.org/2023/10/13/measuring-the-cost-of-red-tape/
Haha hahaha !
Pour le prochain qui dit que j’exagère quand je critique le bordel administratif en France : cette étude trouve qu’en France, c’est 4 % du PIB qui est perdu à cause de la paperasserie inutile.
Avec ça, on est évidemment les champions du monde.
Le deuxième du classement est l’Italie bien loin derrière avec 0,8 %, puis l’Espagne, encore plus loin avec 0,33 % et ensuite l’Allemagne à nouveau avec un facteur deux encore en dessous, avec 0,17 % (et après c’est ~0,10 % ou moins pour tous les autres pays étudiés, c’est à dire des broutilles : ces pays sont quarante fois plus efficaces que la France).
Bref, non c’est pas moi qui délire : la France est une gigantesque usine à gaz administrative.
… et qui perd donc 100 milliards par an pour des formulaires, papiers, documents, justificatifs, actes, duplicatas, attestations… rouges, verts, roses, bleus, arc-en-ciels… inutiles mais imposés par des bureaucrates à la con.
PS : C’est la planète Vogon, ce pays, depuis le temps que je le dis ; que tous les étrangers qui viennent ici le disent tellement ils hallucinent de voir tout ça, en fait.
Et on observe absolument partout que plus on essaye de dématérialiser, plus on imprime de trucs en papier car le démat ne fait pas tout.
Faut être réaliste : aucun pays au monde n’a les moyens de produire un système numérique capable de gérer ce bordel (même ChatGPT se casserait les dents). Quant à le faire nous-même, je suppose que ça demanderait trop d’administratif et de réunions en #FrenchTech pour coder de quoi organiser l’administratif en question : c’est un cycle infernale, je vous dis, hahaha.
Je rejoins Jeff : L’avenir appartient à ceux qui savent correctement demander quelque chose à une « IA ».
Avant on [les geeks / amis-qui-s’y-connaît-en-ordis] étaient les rois car on savait mieux poser les questions à Google que le quidam moyen. Je constate la même chose avec Dall-E ou ChatGPT : avec les phrases banales, il ne comprend rien. Mais en variant les tournures et avec les bons mots clés, cela change tout.
Le truc amusant toutefois, c’est si on veut un truc hyper-spécifique, il faut une commande hyper-spécifique aussi. Or, une commande suffisamment spécifique pour être comprise et interprétée exactement comme on le souhaite, bah ça s’appelle du code !
Cf ce Commit-Strip qui avait tout compris depuis 10 ans : https://www.commitstrip.com/fr/2016/08/25/a-very-comprehensive-and-precise-spec/?setLocale=1
Au final, je vois ça comme une étape d’abstraction supplémentaire après le binaire → assembleur → langage de haut niveau → commande IA.
Au lieu de faire de l’ASM, on fait du code, qu’on compile ensuite en ASM, et que le CPU interprète ensuite en binaire Désormais, on ne fait plus du code, mais on fait des commandes pour IA qui vont eux faire notre code (puis compilation, ASM, binaire).
… mais ça demandera toujours d’être hyper-spécifique si on veut du code spécifique.
Il y a probablement que chose à gagner : je pense qu’on hurlerait si on avait à tout coder en ASM au lieu de faire du JS, C++ ou PHP, donc je pense que ça sera plus simple pour tout le monde dans une génération ou deux à taper des commandes pour IA.
Mais faut pas se leurrer non plus : on (les programeurs) ne seront pas remplacé pour autant.
Quelques raisons :
– La logique qu’on utilise dans le code (ou dans une requêtre google efficace par rapport à une requêtre pourrie) est quelque chose de transposable à des commandes pour IA. Si l’on apprend les maths à l’école, c’est pas pour utiliser les cosinus() sous les jours, mais pour nous former à manipuler des problèmes et utiliser des outils abstraits dans nos têtes. De même, le fait d’avoir appris du code nous a donné la méthode nécessaire pour comprendre le fonctionnement d’une IA et savoir l’utiliser au mieux.
Y a 50 ans, le langage de programmation royal était le Cobol, le Pascal, etc. Aujourd’hui, plus personne ne fait ça, sauf quelques rares individus. Aujourd’hui, ces personnes là sont payés à pris d’or car ces langages sont rares, antiques, mais constituent toujours le fondement de tout un tas de systèmes informations cruciaux. Dans 50 ans, ça sera le PHP, le C ou le Python. Quand j’étais petit, on nous disait que l’avenir appartiendra aux informaticiens, et que les métiers comme plombiers ou électriciens seront de la merde. Aujourd’hui, les plombiers, électriciens, charpentiers, plâtriers, et même mécaniciens… n’ont jamais été autant demandés, autant débordés et aussi bien payés. Certains métiers ne disparaissent pas. Tant mieux. Pour les codeurs, ça sera pareil : les IA ne sortent pas de n’importe où. Il faut les coder.
– Tout comme le binaire seul a donné une poignée d’architectures matérielles, et un énorme paquet de langages, on aura également un gros paquet d’IA. Les maîtriser toutes sera impossible. Il y aura des spécialistes ChatGPT, des spécialistes Dall⋅E, etc. Une personne ne pourra pas tout faire, en tout cas pas de façon experte à chaque fois. Oui, on parle de dév full-stack, mais ça ne vaudra jamais toute une équipe avec des gens spécialisés. Donc non, l’IA ne va pas mettre tout le monde à la retraite : il faudra toujours autant de monde pour toujours autant d’applications.
Et enfin, c’est pas parce qu’on code en langage de prog de haut niveau que tout peut se faire avec ça. Certaines applications de pointe sont toujours faites en ASM, en communiquant directement avec la machine (micro-systèmes embarquée dans des périphériques spécifiques, ou encore les systèmes qui demandent une réactivité très importante avec une latence très faible, impossible à tenir avec un langage compilé qui ne sera jamais autant optimisé).
De même, un code produit par une IA pourra fonctionner convenablement, mais ça ne sera jamais aussi propre, rapide et optimisé que du code écrit à la main. Suffit de voir ce que les WYSIWYG ont donné comme code dans une page web, comparé à du HTML écrit à la main. Ce sont deux mondes différents.
Donc oui, l’IA pourra aider un max de gens à se dépatouiller avec leurs problèmes (en supposant qu’ils n’aient pas tellement la flemme qu’ils vont demander ça à d’autres), mais il faudra toujours une forme d’intelligence humaine et une logique que tout le monde n’a pas pour interagir avec l’IA. De plus, il y aura plusieurs IA et — à moins de leur spécifier (je suppose) — les IA ne feront pas de code aussi propre qu’un programmeur.
Oui, ça suppose que l’intelligence humaine reste supérieure à l’intelligence machine. Actuellement, en 2024, c’est très très TRÈS largement le cas. Les « IA » actuelles sont réellement débiles. Elles font de jolies choses, mais il n’y a aucune intelligence dérrière. Ni aucune créativité, d’ailleurs.
Et puis, qui mieux qu’un humain peut comprendre le problème qu’un humain peut avoir ? Sûrement pas une machine. La machine pourra aider, voir proposer un truc. Mais ça ne sera jamais la meilleure solution.
Le hasard fait que Bertrand Cochard, agrégé et docteur en philosophie et enseignant la philosophie esthétique à l’école municipale d’arts plastiques de Nice (Villa Thiole), vient de publier un ouvrage, "Vide à la demande", qui traite de notre rapport chronophage aux séries télés en plein festival de Canneseries. Alors que le jeune doctorant est en rencontre à la librairie Masséna de Nice, ce mardi, pour son ouvrage, il nous semblait important de dialoguer avec lui autour des séries mais surtout de la manière dont leur surconsommation durant notre "temps libre" dit quelque chose de notre époque.
Comment est née l’idée de ce livre?
J’avais écrit un ouvrage sur Guy Debord (‘‘Guy Debord et la philosophie’’) et je préparais un autre livre destiné à faire connaître ses thèses sur le temps libre à un plus grand public. C’est lors d’un dîner avec un directeur de collection des éditions L’Échappée, Patrick Marcolini, que l’on m’a proposé d’écrire spécifiquement sur les séries. Durant la nuit, j’ai écrit l’introduction, qui n’a pas beaucoup bougé depuis, et on s’est lancé.
À qui s’adresse ce livre?
À ceux qui s’intéressent aux séries mais également à ceux qui essaient de comprendre comment les séries sont devenues une activité chronophage dans une époque où plus personne n’a le temps de rien. Je ne suis pas là pour faire culpabiliser ceux qui aiment les séries mais plutôt pour engager une réflexion sur le temps libre, en montrant qu’il s’agit d’un enjeu éminemment politique.
Qu’est-ce que le temps libre?
C’est d’abord le temps hors travail, et celui dont on dispose quand nous ne sommes pas astreints par les tâches nécessaires du quotidien. Le temps libre peut être pensé comme un ‘‘budget temps’’ dont on peut disposer à sa guise. Or, le propre d’une série, c’est bien de consommer du temps, de faire passer le temps. Et je crois que cela signale une forme de vide que l’on cherche à combler. C’est un phénomène analogue à celui des smartphones, que l’on utilise systématiquement dans les transports en commun, dans une file d’attente.
Les séries serviraient-elles uniquement à combler un vide? Une activité passive en quelque sorte?
Elles nous portent dans le temps car elles nous permettent d’oublier, parfois, nos soucis du quotidien; elles nous délivrent aussi de cette lourde tâche d’avoir à penser à nous-même. Je pense ici à la théorie développée par Alain Ehrenberg dans ‘‘La fatigue d’être soi’’. Dépression et société. Au fond, notre temps libre l’est faussement car il y a une forme de passivité quand on regarde une série, il n’y a pas besoin de trouver une motivation inouïe pour lancer un épisode. Quand on a beaucoup d’énergie et envie de se dépenser, on ne lance pas un épisode. Dans nos sociétés modernes, il est structurellement difficile de s’ennuyer car les tentations, notamment numériques, sont partout. Et ce d’autant plus que l’on considère le temps libre comme un temps que le travail libère, comme un temps produit par le travail. Ce temps durement acquis, chacun veut le mettre à profit, il faut le rentabiliser. Regarder une série donne cette sensation.
Pourquoi juge-t-on différemment un consommateur de séries et un lecteur?
Par le rapport à l’écran. C’est scientifiquement prouvé que la surexposition aux écrans a des incidences sur le sommeil, l’attention, la sédentarité. On ne sollicite pas les mêmes zones du cerveau quand on lit et quand on regarde un écran.
Qu’est-ce que la consommation des séries raconte de notre époque?
En 2019, 60% des Français disaient suivre une série au moins une fois par semaine, 30% tous les jours. Des chiffres qui montrent que les séries sont devenues le passe-temps préféré des Français. Il y a un vrai attachement au récit, à la narration, tout doit raconter une histoire, c’est sans doute lié à notre époque où il y a une forme de paralysie historique: l’histoire semble se répéter, les guerres, l’enlisement. On se rattache à des récits, à la forme du récit, dans une époque historique caractérisée par l’inertie et la crise permanente. Le confinement a été un marqueur fort de la consommation des séries, cela a amplifié la popularité des séries auprès des gens. On consomme des séries à chaque moment de notre vie, quand on fait la cuisine, quand on s’endort, quand on prend les transports…
Comment éviter cette surconsommation?
C’est une question plus large qui concerne le temps de travail, le temps d’écran, le fait de privilégier des activités avec une forme d’accomplissement. On dit parfois que les séries nous donneraient à penser mais elles ne sont souvent que l’illustration de théories déjà existantes. Une série n’est pas autosuffisante: elle peut donner lieu à une prise de conscience, soit, mais c’est le passage à l’action historique qui est sujet à caution. Les séries disent ce qu’est notre société actuelle, avec une forme d’individualisation, car nous les consommons souvent seuls, à domicile, il y a une forme de repli sur soi, c’est une activité solitaire même si on en parle beaucoup avec nos proches mais on se regroupe très rarement pour regarder un épisode.
"Vide à la demande - Critique des séries".
Éditions L’Échappée. 176 pages. 17 euros.
découvert par article https://www.nicematin.com/environnement/pollution-de-la-mer-francoise-loques-sentinelle-chevronnee-de-la-mediterranee-menacee-913700 sur Françoise Loquès
Pendant six ans, jusqu’en 2022, Félicien Faury a échangé avec des dizaines d’électeurs du Rassemblement national du Sud-Est de la France. Ce sociologue a décidé de se pencher sur le sud de la région Provence-Alpes- Côte d’Azur, bastion de l’extrême droite du pays. Pour comprendre les motivations et les mécanismes de la normalisation du vote du parti de Marine Le Pen et de Jordan Bardella. Il en a tiré un livre: "Des électeurs ordinaires, enquête sur la normalisation de l’extrême droite" (édition du Seuil). Interview.
Pourquoi avoir choisi le Sud-Est?
C’est un territoire qui a donné ses meilleurs scores au RN à ses débuts, et le vote y est très important. C’est là que les premières municipalités ont été conquises, et la région Paca est celle qui a élu le plus de députés RN en 2022. Par contre, on en parle moins dans les discours publics, on se focalise plus sur le RN du Nord, de la classe ouvrière, des victimes de la désindustrialisation. Je voulais donner à voir une autre image, une autre réalité.
Quelle est la spécificité de ce territoire?
Dans ce vote RN, on trouve davantage de classes populaires établies, stabilisées, et de petites classes moyennes. Ce sont des catégories sociales très importantes pour le RN, surtout maintenant. Ce sont des gens qui ne se sentent pas en danger sur le marché du travail, la rhétorique de l’étranger voleur de travail n’est pas opérante. L’immigré menaçant, ici, c’est l’immigré qui ne travaille pas, au chômage. Il bénéficie des aides sociales qu’il va voler aux "vrais Français". Il y a une aversion envers les immigrés, mais aussi envers l’État et sa redistribution.
Peut-on parler de territoire en déclin?
On n’est pas du tout sur des territoires en déclin en Paca. C’est une économie résidentielle et touristique très développée. Le souci n’est pas l’emploi, mais le logement, l’inégalité territoriale. Ces électeurs ont l’impression d’être pris en tenaille, entre des quartiers appauvris, avec beaucoup de classes précaires issues de l’immigration, et les "coins sympas" très convoités et inabordables. Cet immobilisme résidentiel contraint est une donnée très importante dans le vote RN.
Pourquoi d’autres lectures, comme la critique de ce qui provoque ces inégalités, échappe à ces électeurs?
Ça ne leur échappe pas. Ce qui est en jeu, c’est l’imaginaire des possibles politiques. Beaucoup vont critiquer les riches, les inégalités sociales. Mais il y a un fatalisme: "Qu’est-ce que tu veux y faire"? Ce qui contraste avec la pression de l’immigration qui, pour eux, pourrait et devrait être évitable. Le vote RN n’est pas purement identitaire: il y a des logiques sociales, fiscales.
Vous parlez de "concurrence des pauvretés"…
Ce qui domine dans les discours, c’est l’impression que l’économie est une sorte de stocks finis et que plus les minorités ethno-raciales auront de ressources, moins on en aura, "nous", les "Français", comme beaucoup se qualifient sur mon terrain. Notamment pour l’accès aux logements sociaux. "Eux, ils en ont, pas nous".
Ces visions sont-elles fondées?
Ce qui m’intéressait, c’est d’avoir leur vision du monde. On peut remarquer que cette logique du "immigré = chômeur" passe par l’invisibilisation de tout un ensemble de métiers vitaux effectués par la main-d’œuvre étrangère ou immigrée, en particulier en Paca. Les récoltes saisonnières, le service à la personne, le BTP… Énormément d’immigrés ou d’étrangers travaillent dans ces secteurs, or cela est très peu évoqué. Il y a peut-être un travail à faire dans les discours publics.
Par contre, cette association entre immigrés et pauvreté, les électeurs ne l’inventent pas complètement. Dans les quartiers les plus défavorisés, on constate une surreprésentation des immigrés. Ce qui est intéressant, c’est l’interprétation donnée. On se dit que l’immigré est fainéant, qu’il y a une mauvaise volonté. Or, les sciences sociales insistent sur les causes structurelles: les immigrés ou étrangers ont moins de ressources, de réseau, pour accéder au travail, ou sont victimes de discrimination du fait de leur couleur de peau ou d’autres critères.
Sachant que ce qui est vu comme un "immigré" peut être une personne française depuis plusieurs générations…
Tout à fait. Sur mon terrain, les personnes qu’on appelle "immigrés" ou "étrangers" sont en fait la plupart du temps des personnes françaises, mais qu’on identifie comme "issues de l’immigration" du fait de leur accent, de leur couleur de peau ou de certaines pratiques religieuses visibles par exemple.
Vous parlez beaucoup du fait qu’on a tendance à oublier le racisme des électeurs RN. Quelle est l’importance du racisme?
Ce n’est pas forcément agréable à dire, mais oui, le racisme reste central dans le vote RN. Mais il me semble que c’est de moins en moins signalé au sein des commentaires médiatiques. Selon une étude du CEVIPOF, en 2022, 92% des électeurs RN estimaient que "la plupart des immigrés ne partagent pas les valeurs de notre pays". Quand vous faites des entretiens avec ces électeurs, c’est un élément incontournable. Bien sûr, la thématique du déclassement, de l’incertitude économique, est très importante. Mais si vous enlevez le rejet des immigrés, vous ne pouvez pas comprendre pourquoi ces électeurs ne votent pas pour la gauche par exemple.
Vous évoquez chez les électeurs RN des déçus de la droite traditionnelle. Comment jugez-vous la position d’Éric Ciotti, de prôner l’alliance LR/RN?
C’est un discours logique, face à l’électorat local auquel il est confronté. Depuis longtemps, il y a une porosité, une continuité entre la droite et l’extrême droite. Mais pour Éric Ciotti, cela relève quand même d’une aventure individuelle. Le cordon sanitaire du parti est resté solide. Chez les électeurs, c’est plus compliqué. Certains électeurs de droite ne veulent certes pas voter pour l’extrême droite. Mais pour d’autres, le vote RN est aussi de plus en plus un vote utile. C’est une vraie transformation historique. On se dit que le RN peut arriver au pouvoir, et qu’il faut donc voter pour lui pour éviter que la gauche l’emporte.
Autrefois, on avait honte de voter RN. Quels sont les signes de la dédiabolisation du RN?
J’ai voulu m’intéresser à la normalisation du RN dans les interactions du quotidien, les conversations ordinaires. Quand on vit dans des territoires où de plus en plus de personnes votent RN, ça légitime son propre vote pour ce parti. Il y a aussi une normalisation des thématiques de l’extrême droite: on se retrouve dans des situations où les discours anti-immigrés, par exemple, sont très peu contestés. Tout le monde ne vote pas RN, mais c’est devenu la parole légitime.
Le RN reste-t-il un parti d’extrême droite?
Le RN (alors FN) a été créé en 1972 par Ordre nouveau, un groupuscule d’extrême droite, très radical, dans le but d’offrir une vitrine légitime à ces idées d’extrême droite. Dès le départ, sa raison d’être, c’est la normalisation publique et médiatique de ses idées. Évidemment, depuis, il y a eu des transformations très importantes. Mais ce qui n’a pas changé, c’est cette colonne vertébrale qu’est la préférence nationale, qui est une mesure anticonstitutionnelle, et qui s’accompagne d’un discours négatif sur les immigrés. Ce socle n’a pas bougé. C’est ce qui permet de le classer à l’extrême droite.
Cette préférence nationale se nourrit d’une priorité qui serait jusqu’à présent donnée aux étrangers par les pouvoirs publics. Existe-t-elle?
Cette préférence nationale est reçue par les électeurs comme une préférence racialisée, la distinction entre les "vrais Français" et les autres, les minorités ethnoraciales. On évoque parfois l’idée d’une "préférence étrangère", avec un État davantage favorable aux minorités. Il faut rappeler que c’est tout simplement faux: on sait qu’il n’existe aucun traitement de faveur des services publics vis-à-vis des immigrés et des étrangers, c’est même très souvent l’inverse. Les minorités sont victimes de discriminations importantes, et il y a aussi par exemple un non-recours très important des familles immigrées aux aides auxquelles elles ont droit.