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Contraignant, fatigant, le rôle de l’aidant est d’autant plus complexe, difficile qu’il est souvent démuni face à la maladie neurodégénérative et aux troubles cognitifs de son proche. Confronté aux changements d’humeur, aux pertes de capacités cognitives, il ne sait pas toujours comment réagir.
À cette incompréhension parfois source de relations conflictuelles, il y a un remède: la formation. Encore faut-il pouvoir se libérer.
Souvent isolé, allant parfois jusqu’à renoncer à ses activités personnelles, l’aidant culpabilise facilement à l’idée "d’abandonner" – même pour quelques heures – celui qu’il accompagne au quotidien.
L’association Coridys (1) contourne cet obstacle en proposant, depuis peu, des formations aidants/aidés. Deux neuropsychologues les accueillent simultanément: tandis que les aidés bénéficient de séances orientées vers la stimulation des différentes fonctions cognitives, les aidants profitent sans culpabilité d’un moment à eux pour se former et apprendre à gérer les situations complexes auxquelles ils sont confrontés.
Pauline Lebas et Mélanie Biasini sont les neuropsychologues en charge de cet atelier dont la première session s’achèvera fin décembre. Elles en détaillent le contenu et les objectifs.
Le programme pour les aidants
L’intitulé de l’atelier résume son principal objectif: "Vivre heureux avec les troubles cognitifs de mon proche".
"Lors de la première séance, explique Mélanie Biasini, je propose un quiz, qui permet d’évaluer les connaissances des participants sur les maladies neurodégénératives et les troubles cognitifs. On explique ensuite ce qu’est une démence, comment les troubles cognitifs évoluent, ce qu’on peut faire pour les éviter ou ralentir leur progression…"
À la fin de chaque séance, une fiche résumant les informations transmises est remise aux participants.
Au fil des huit séances, "on apprend aux aidants à repérer les capacités de leurs proches qu’il faut encourager, on explique qu’il faut favoriser les activités qui ne le mettent pas en échec ou encore comment préserver leur capacité de décision."
Une séance est consacrée à l’aménagement de l’environnement du proche aidé. "Une photo sur une armoire, par exemple, peut lui permettre de retrouver ses affaires, un calendrier avec les activités de la journée va l’aider à s’orienter dans son quotidien, à maintenir une certaine routine."
Les aidants acquièrent également les clés pour savoir réagir face aux situations provoquées par des troubles du comportement de leur proche, ou faire face à leur propre fatigue. "Il faut aussi apprendre à prendre soin de soi" poursuit Mélanie Biasini.
Une séance est ainsi consacrée au rôle de l’aidant, à ses difficultés, ses attentes et ses besoins; une autre aborde les différentes aides financières, comme l’APA (aide personnalisée à l’autonomie) et les soutiens possibles – les structures de répit qui permettent à l’aidant de souffler quelques heures ou quelques jours chaque semaine.
Du côté des aidés
Pendant ces séances de formation des aidants, les aidés sont accueillis par Pauline Lebas, dans une salle contiguë. "Lors de la première séance, on travaille sur le thème du temps qui passe et sur les grands changements de notre époque, avec une frise à reconstituer: le droit de vote des femmes, les premiers téléphones mobiles…"
Au fil des rencontres, les activités proposées activent différentes fonctions cognitives, de manière ludique: la mémoire procédurale avec un protocole à mettre en œuvre autour de l’outil informatique, la mémoire épisodique avec la stimulation des sens grâce à un loto des odeurs inspiré de la méthode Montessori, la mémoire sémantique avec des mots mêlés ou des proverbes à compléter…
L’atout de ce programme, c’est aussi qu’il met en avant, pour les aidants, les capacités sensorielles, motrices, sociales ou cognitives de leurs proches. Ces capacités préservées, résumées sur une "fiche des capacités" remise aux participants, sont valorisées lors de séances communes.
Un travail en commun
Les deux groupes se retrouvent et concrétisent la possibilité de conduire des activités ensemble. Les participants de cette toute première session ont ainsi passé une matinée ensemble à confectionner des couronnes de fleurs et ils sont allés visiter le musée de l’école, une sortie qui a permis de solliciter la mémoire des aidés tout en permettant aux binômes aidants/aidés de profiter d’un moment agréable ensemble.
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Une nouvelle session "Vivre heureux avec les troubles cognitifs de mon proche" est programmée à partir du 6 janvier 2025.
Elle se déroulera sur huit séances gratuites (engagement à suivre le cursus complet) les lundis de 9h30 à 11h30 dans les locaux de l’association Coridys, Parc Athéna à Ollioules.
Inscriptions avant le 16 décembre :
- par téléphone au 06.66.05.74.39.
- par mail : développement @coridys.fr
L’intérêt des activités physiques et de la pratique sportive sur la santé n’est plus à démontrer. Mais qu’en est-il de leur impact sur la mémoire et la cognition en général? Les réponses du Dr Agnès Benvenutto, neurologue varoise (1). Explications en trois temps.
- Rappel: comment fonctionne le cerveau
Divisé en cinq lobes – frontal, pariétal, temporal, occipital et cervelet – le cerveau est le siège de la cognition, c’est-à-dire de l’ensemble des processus mentaux qui permettent de traiter les informations. La cognition met en jeu la mémoire, mais aussi le langage, le raisonnement, les fonctions exécutives et l’attention.
"La cognition, rappelle en préambule le Dr Benvenutto, évolue avec l’âge. On note, par exemple, une diminution de la vitesse de traitement des informations par les fonctions exécutives. Le volume cérébral diminue également." Au vieillissement normal du cerveau s’ajoute parfois un vieillissement pathologique (maladie d’Alzheimer et maladies apparentées, troubles cognitifs vasculaires, tumeurs cérébrales…).
- Les effets positifs observés
Plusieurs études épidémiologiques ont montré l’intérêt de la pratique sportive pour la mémoire et la cognition. Le Dr Benvenutto en cite trois. "L’étude ACT aux USA, conduite durant six ans auprès de 1.740 personnes âgées de plus de 65 ans en bonne santé cognitive, a montré qu’une activité physique au moins trois fois par semaine réduit significativement le risque de développer une démence, et des difficultés cognitives associées à une perte d’autonomie."
En Europe, l’étude "Fine" a pointé, elle, un déclin cognitif plus important chez les personnes diminuant leur activité physique par rapport à celles qui l’avaient augmentée. Cette même étude pointe également l’effet positif d’une activité physique, même débutée tardivement.
La dernière étude, "Movies" aux USA, montre un impact plus important d’une activité physique en aérobie (2) pratiquée au moins 30 minutes, trois fois par semaine.
- Les effets démontrés
"D’autres études prospectives ont prouvé ces bénéfices et confirment l’effet protecteur de la pratique physique pour l’évolution des pathologies cognitives, en particulier la maladie d’Alzheimer" poursuit le Dr Benvenutto.
Une méta-analyse portant sur les résultats de 125 études prospectives concernant un total de 33.816 sujets non déments, suivis durant 1 à 2 ans, prouve qu’une activité physique importante réduit de 38% le risque de déclin cognitif par rapport à des personnes sédentaires (réduction de 35% s’il s’agit d’une activité physique modérée).
Une autre étude prospective, conduite sur une durée de 6 ans, a permis le suivi de 1.740 personnes sans démence initiale. A son terme, 1.185 patients étaient indemnes et 158 avaient développé une maladie neurodégénérative, Alzheimer le plus souvent.
Le Dr Benvenutto commente: "L’étude conclut que le déclin a été plus rapide quand l’activité physique était inférieure à trois fois par semaine." Une dernière étude conclut, enfin, que l’activité physique en aérobie combinée à du renforcement musculaire apporte un bénéfice supérieur aux activités en aérobie seules.
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Elle s’exprimait sur ce thème dans le cadre d’une conférence "Jeudi sport santé" organisée début mai par le Comité départemental olympique et sportif du Var.
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Lors de l’activité physique en aérobie, la production d’énergie dépend de l’apport en oxygène. En anaérobie (effort intense et bref), l’énergie est puisée dans les stocks disponibles dans l’organisme.