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Depuis quelques années, le port de Théoule-sur-Mer rencontre un problème d’agitation. "La houle rentre à l’intérieur du bassin et ça a un effet au niveau des bateaux qui tirent sur leurs amarres et on a eu des bateaux abîmés à cause de ça, soupire Caroline Hemingway, directrice du service maritime de la Ville. Il faut donc ralentir la houle pour protéger les personnes et les biens."
La solution serait donc d’allonger le musoir, c’est-à-dire la partie terminale de la digue. Et ce dossier devrait bientôt être clôturé, puisque les travaux sont envisagés dans le courant du mois de janvier.
Mais avant, la Ville a dû mettre en place des mesures compensatoires. Et quitte à le faire, autant en profiter pour mettre en place un volet expérimental, et ne pas "réaliser des mesures pour réaliser des mesures. Autant participer à la science."
Alors, un partenariat a été conclu entre la municipalité et l’université Stella Mare, en Corse.
"Voir si un temps de résidence est favorable à l’espèce"
Parmi ces mesures compensatoires, il y a notamment la relocalisation de 31m² d’herbiers de posidonies, à quelques mètres de leur emplacement initial. "Le simple fait de réimplanter de la posidonie c’est de l’expérimentation, mais ça ne nous suffisait pas."
Certains plans, plutôt que d’être transféré dans la foulée, ont donc été transportés en bateau jusqu’en Corse puis stocké dans un bassin d’eau de mer, reproduisant au maximum les conditions de leur milieu naturel, puis acheminé de nouveau à Théoule pour y être transplanté.
"L’idée c’est de voir si un temps de résidence est favorable à l’espèce, détaille Briac Monnier, enseignant chercheur à Stella Mare et chef de l’opération. Pour tester si dans le cas de phase de travaux comme c’est le cas ici, on peut les maintenir un certain temps avant de pouvoir les replanter."
Si les boutures transplantées mi-novembre – une centaine – par les membres de Stella Mare ainsi que par des agents municipaux sont restées une trentaine de jours en bassin, d’autres plants attendent encore leur tour. "L’objectif c’est d’essayer de les transplanter au bout d’un, deux et trois mois, pour évaluer s’il y a une reprise."
Nombre de feuilles, de tiges…
Une fois par mois, pendant trois mois, l’équipe reviendra pour effectuer des suivis et relever des paramètres, pour surveiller la plante et sa santé: "Nombre de feuilles sur chaque plan, nombre de tiges, longueur des rameaux… On mesure aussi le taux de glucide dans les racines de la plante, pour voir si elle est en bonne santé ou pas."
Enfin, pour protéger ces herbiers de posidonie de l’ancre des bateaux, le service maritime travaille actuellement sur un balisage.
"Avec toute la force environnementale de Théoule, sur le plan maritime ou terrestre, [...] on veut vraiment qu’elle devienne une ville d’expérimentation en faveur de la biodiversité et de l’environnement", conclu Caroline Hemingway.
Les agents de la Ville formés aux expérimentations
Ce n’est pas la première fois que Théoule-sur-Mer travaille avec Stella Mare. Une convention de partenariat a déjà effectivement été signée en vue d’un "transfert de technologie de réimplantation de l’oursin".
L’université "maîtrise la réimplantation de l’oursin en Corse. Là, l’enjeu c’est de voir si leur procédé marche sur le continent", confie Caroline Hemingway, directrice du service maritime de la Ville. Pour faciliter les choses, les agents de son service ont été formés pour effectuer des manipulations afin d’éviter les déplacements récurrents des universitaires corses.
En parallèle, toujours pour l’université, les agents réalisent, toutes les semaines, et une fois par mois en fonction des périodes de ponte, un relevé d’indices gonadiques.
Pesée des organes sexuels
Les agents plongent pour récupérer quinze oursins, puis les mesurent, les pèsent, les ouvrent et pèsent les gonades (organes sexuels), déterminent leur sexe… Ces données sont ensuite envoyées à Stella Mare.
Pour mener à bien cette mission, une cellule de plongée et un petit laboratoire ont été mis en place dans le poste de secours, au port de Théoule.
Et, très bientôt, un inventaire des oursins va être réalisé, par les agents toujours. Et si au bout de quelques années un déclin de l’oursin est constaté, "il va falloir qu’on travaille avec les services de l’état pour interdire la pêche dans le parc".
En permettant aux agents – du service maritime mais également ceux des services techniques – d’assurer ces missions d’expérimentation, "nos agents trouvent un sens à ce qu’ils font. Ils sont contents d’arriver le matin, ils savent qu’ils vont participer à des projets qui vont, quelque part, protéger l’environnement et la planète."
La campagne Inf’eau mer sera présente cet été sur les plages du littoral pour répondre à vos questions concernant l’environnement et la protection de la mer.
découvert par article nice matin https://www.nicematin.com/vie-locale/a-mandelieu-et-ailleurs-ils-se-mobilisent-pour-la-mer-939857
La qualité de notre littoral est l’affaire de tous ! » affirme le conseil scientifique des îles de Lérins qui organisait une journée de sensibilisation sur la plage des Dauphins en ce début de mois d’août.
Installé sous un chapiteau à l’entrée de la plage, Damien Lagrange, chargé d’études en biologie marine au sein du conseil scientifique, explique: "Invité par la Ville de Mandelieu, on vient ici à la rencontre du public pour solliciter son avis sur la qualité de l’eau et de la plage. On en profite pour parler déchets, pollution, et donner des infos sur les bons gestes!"
Résidents locaux et vacanciers sont venus se renseigner, discuter et remplir le questionnaire "Inf’eau mer". Rôle de la posidonie, utilisation raisonnée des douches (toujours à l’eau potable!) mégots, tri des déchets, le public présent se prête au jeu de l’enquête avec intérêt.
"J’ai l’impression de rencontrer des personnes de plus en plus sensibilisées, preuve que l’on sert à quelque chose" souligne en souriant Damien.
Stephan et son épouse, résidents de l’agglo, récupèrent prospectus informatifs et petits cadeaux, appréciant "une très bonne initiative".
Cette campagne au plus près du public permettra de remonter de nombreuses informations pour mieux gérer la qualité de l’eau et celle de nos plages, sollicitant l’implication de tous.
Il reste encore quelques dates, notamment à Cannes. Ce sera les 20, 27 et 30 août au Méditerranoscope de l’île Sainte-Marguerite, le 21 août plage Gazagnaire et le 27 août plage du Riou.
Relier des images identiques pour libérer des lignes, franchir des niveaux, gagner des badges, faire grimper son score... Ces règles à la Candy crush sont en fait celle d’une appli mobile gratuite destinée... à faire avancer la recherche scientifique en terres azuréennes.
Son nom: Play for plankton. Plutôt que d’y aligner des bonbons identiques, les aficionados de jeux sur smartphone y relient des variétés de planctons similaires en analysant les images qu’ils ont sous les yeux, issues de prélèvements faits sur nos côtes méditerranéennes.
À l’initiative: la Française des jeux (FDJ) associée au Laboratoire d’océanographie de Villefranche, rattaché à Sorbonne université. L’idée de l’appli s’est échappée de l’esprit de Jean-Guy Escolivet, salarié de la FDJ mais aussi passionné de jeux vidéo et soucieux de l’environnement. "Elle a vu le jour grâce au programme d’intrapreneuriat à travers lequel la Française des jeux permet à ses employés de bénéficier d’un détachement pour développer en équipe un projet innovant", détaille l’entreprise.
En plus du temps accordé à son collaborateur créatif, la société a largement financé le jeu, qui a nécessité 10 mois de développement.
Près de 500.000 images à trier
Du pain béni pour les scientifiques de la Côte d’Azur, qui passent le plus clair de leur temps à scruter les différentes espèces de plancton, ces petits organismes si essentiels à l’environnement. "Depuis 1967, nous effectuons à Villefranche des suivies historiques, quasi uniques au niveau mondial. Tous les jours ouvrés, le bateau de la station va dans la rade et prélève du plancton. Chaque semaine, un pot est collecté et conservé dans du formol. Il peut ainsi se garder des dizaines d’années", détaille Jean-Olivier Irisson, chercheur en écologie du plancton, qui supervise ces travaux.
Pour étudier finement l’impact du changement climatique au fil du temps sur ces organismes microscopiques, qui jouent un rôle crucial notamment dans la captation du CO2, une toute petite équipe est ensuite chargée d’effectuer un tri dans ce colossal volume prélevé: quantifier les individus, les mesurer, définir et nommer les différentes espèces...
Un travail de fourmi, reposant sur les épaules de la technicienne Corinne Desnos. "La technique d’analyse traditionnelle, c’est de mettre une partie du plancton sous un microscope pour classer tout ça. En 2010, nous avons développé un scanner étanche qui extrait toutes les images d’un prélèvement. Puis, nous avons créé un outil d’intelligence artificielle qui nous suggère une première identification de l’espèce", détaille Jean-Olivier Irisson.
Les yeux des quelque 13.000 gamers inscrits sur Play for Plankton complètent désormais ce tableau. "Nous avons livré à l’équipe de la Française des jeux 474.000 images, soit deux années de prélèvement: 2021 et 2022. En s’amusant, les joueurs en ont déjà trié 182.000. Nous récupérons ensuite ces données sous forme de tableau et Corinne opère une vérification, cela lui fait un premier filtre", détaille le chercheur.
Et, bonne nouvelle, le cerveau humain n’est pas encore dépassé par la machine: "D’habitude, avec nos outils d’IA, on obtient des résultats juste entre 75 et 80%. Pour l’instant, les joueurs sont meilleurs de quelques pourcents de plus", glisse le scientifique.
Un puissant accélérateur de sensibilisation
Mais là n’est pas l’unique intérêt de Play for plankton... Car, sans avoir l’air d’y toucher, le joueur-trieur, dans sa quête, glane aussi dans ses filets de nombreuses informations scientifiques. Passé le niveau 3, on apprend, par exemple, que "l’augmentation des émissions de CO2 acidifie les océans" et que "cela nuit au développement des planctons qui captent alors moins de CO2".
À collectionner: des anecdotes mais aussi des fiches informatives sur chaque espèce, rédigées par Denys Altukhov, assistant ingénieur ukrainien spécialiste du plancton, réfugié de guerre à Villefranche. "Au total, 17.000 fiches ont déjà été lues sur l’appli", recense la Française des jeux.
"Cela dépasse très largement ce qu’on peut faire seuls en termes de communication, s’enthousiasme Jean-Olivier Irisson. Au sein du labo, nous avons un département sensibilisation mais les ordres de grandeur ne sont pas comparables. Les jours de Fête de la science, on touche 300 personnes..."
Le scientifique en a d’ailleurs fait l’expérience chez lui, avec son fils de 13 ans, fan de jeux vidéo et bêta testeur n° 1 de Play for plankton. "Lui s’est surtout piqué au jeu pour franchir les niveaux et récupérer le maximum de badges. Mais c’est arrivé qu’il vienne me partager une info qu’il avait apprise en débloquant une anecdote. Ça, c’est mon badge à moi!", sourit le papa.
Des améliorations à venir
Envie de rejoindre cette aventure ludique de sciences participatives? L’application, qui sera bientôt améliorée, est téléchargeable gratuitement. Seul bémol: pas toujours évident de s’y retrouver dans ces 50 nuances de micro-organismes à trier. Mais les paires d’yeux les mieux aiguisés devraient pouvoir contribuer à faire avancer la recherche. Alors, à vous de jouer!
Le jeu Play for plankton est disponible gratuitement sur l’App store, Google Play et Androïd.
Liens
App Store iOS https://apps.apple.com/fr/app/play-for-plankton/id6453474669
Google Play Store https://play.google.com/store/apps/details?id=io.Blackfoot.PlayForPlankton&hl=fr
EdEdmund Platt, dit "L’Escargot anglais", et Frédéric Munsch, dit "Le Sanglier marseillais". Deux potes quadragénaires qui se sont rencontrés à Marseille et qui aiment se lancer des défis qu’ils veulent "inspirants". Après avoir marché Marseille-Paris lors du premier confinement, ils ont enchaîné avec Douvre-Dundee (en Écosse) et le tour de la Corse. Le 3 octobre ils se sont lancés dans le Cassis-Cannes, qu’ils ont intitulé "CaCa, la route des mégots". "Une balade engagée", délivrent-ils.
Les deux compères ont ainsi cheminé 200 kilomètres, traversant le Var, en ramassant des cadavres de cigarettes en chemin. Leur triste moisson à leur arrivée, mardi 15 octobre: "12.000mégots." Leur aventure est filmée et postée sur les réseaux sociaux (1) "pour transmettre ce qu’on raconte et partager, parce qu’il y a encore trop de monde qui jette ses mégots". Ils la décrivent comme "un mix entre J’irai dormir chez vous, Pékin express, Nus et culottés et Very bad trip". "C’est une initiative personnelle. Ça parle à beaucoup de monde cette aventure sans cadre. Un matin tu te lèves et tu pars. On espère que ça fasse boule de neige. Les gens donnent des leçons, nous, on donne des idées", déclarent-ils.
"On encourage tout le monde à faire ça"
"L’arrivée à Théoule, c’était génial, se rappellent les deux amis. L’un des endroits les plus beaux du monde. Dans un café, on tombe sur un monsieur qui loue des Airbnb et qui nous prête un appartement. Deux restaurants nous ont soutenus en nous nourrissant. Une copine nous a hébergés à Cannes. Au marché Forville, les commerçants nous ont donné du vin, de la nourriture. Ils avaient envie de faire partie de notre équipe."
Eddie, le professeur d’anglais et écrivain, avec Fred le photoreporter, collectionnent ces rencontres: "On a rencontré des gens dans le réel, pas sur les réseaux. Le fait d’être médiatisé ça valide, ça authentifie. On n’a pas dépensé un centime. Certains se sont battus pour nous héberger. On encourage tout le monde à faire ça. Que ça inspire des influenceurs qui ont plus de poids. Derrière on nous donne au centuple."
"Quand la petite Pamela, sur son banc devant l’hôtel de ville, se lève et commence à ramasser devant les yeux écarquillés de son mec, c’est une victoire, racontent Eddie et Fred. Au Suquet, on a vu des gens se mettre à ramasser avec nous."
Reçu dans un collège de Bormes-les-Mimosas (Var), en mairie de Cannes… Leur démarche se veut dicter par "le plaisir".
"Marre des gens qui se trouvent des excuses"
"On n’en a pas ras le bol même si on n’a pas enlevé 0,00001% de ce qu’il y a par terre, savent-ils. On invite juste les gens qui jettent à jeter un peu moins. On fait ça pour se marrer mais il y en a marre des gens qui se trouvent des excuses pour ne pas jeter leurs mégots dans un cendrier, une poubelle. La mairie de Cannes a distribué 20.000 cendriers et il n’y a jamais eu autant de mégots par terre. Qu’est-ce qu’il faut faire pour faire réagir les gens?" Sur leurs tee-shirts noirs, un slogan plutôt clair qu’ils adressent aux "jeteurs, poseurs et planqueurs": "Arrête de niquer ta mer".
- Instagram et TikTok: @cassiscannes et TikTok
"Quand j’étais gamin, que je me baignais à Cannes, on avait du goudron sur les pieds. Cette pollution était bien plus présente", remémorait lundi le maire de Cannes et président de l’agglomération Pays de Lérins, lors de la réunion du groupe de travail Qualité des milieux marins. David Lisnard voulait mettre en avant l’évolution positive de la protection de l’environnement de la baie de Cannes pour "montrer qu’on peut arranger les choses". L’expérimentation de deux bouées qui serviront à étudier ces fonds marins veut en être l’exemple concret.
L’intelligence artificielle pour protéger la mer
Ainsi, l’objet technologique de la société Biocéanor sera chargé de mesurer et contrôler la qualité de l’eau, en continu. "Peu de collectivités le font. La baie serait vraiment pionnière. On veut regarder ce qu’il se passe dans le milieu, sur des points stratégiques, sur la biodiversité, et comprendre", confie le patron de la société basée à Sophia Antipolis. Pour cela la bouée de Biocéanor va collecter ces données en continu et "y intégrer des données spatiales, de courantologie". "On associe l’intelligence artificielle à nos compétences de biologie marine qui nous permettent de comprendre quel impact a une température, un oxygène sur la qualité de l’eau et la biodiversité, reprend-il. Le but, c’est de pouvoir prédire ces paramètres pour donner des moyens d’action aux collectivités et les accompagner dans la prise de décision".
Une expérimentation menée de façon complémentaire avec Suez, qui va également poser sa bouée de 600kg et 1,5mètres de diamètre dans la baie cannoise. Équipée de panneaux solaires pour être complètement autonome, celle-ci sera chargée "d’écouter la mer", comme le signifie le directeur de l’agence azuréenne de l’entreprise française.
"Chaque animal a son propre son"
"Chaque animal a son propre son. Crabes, oursins, crevettes, cétacés... Tous font du bruit, le jour, la nuit. On enregistre tout ça, précise Emmanuel Carrier. Derrière, c’est notre plateforme, à disposition de la collectivité, qui calcule grâce à l’IA, en fonction de chaque son et de sa fréquence, quelle population on retrouve dans cette partie-là de la baie. On arrive, en direct, à avoir l’information de la population présente. C’est aussi pour analyser l’activité humaine et son impact sur le milieu marin. Donc il faudrait la mettre dans des zones où les bateaux passent. On pourra, par exemple, savoir si l’été il y a moins de dauphins dans la baie parce qu’il y a plus de bateaux".
Où les bouées seront-elles disposées? "C’est encore en discussion avec les autorités. On a identifié des points candidats comme les îles de Lérins, ou plus près de la côte, notamment en fonction des courants marins", répond Samuel Dupont. Alors que celles-ci seront déployées "au printemps prochain", l’objectif à terme serait de pouvoir construire un "réseau de bouées" en fonction de la "dynamique du milieu".
"Suivre l’impact des décisions"
Les deux hommes assurent qu’il est "important de collecter la data, notamment pour suivre l’évolution de l’impact des décisions prises sur la protection de la Méditerranée". Et "les données de l’un peuvent servir à l’autre", livre Samuel Dupont. Le boss de Biocéanor fait état d’une "diminution des stocks de poissons".
"On a un bien commun qu’il est important de protéger pour le transmettre dans les meilleures conditions, exprime l’adjointe au maire de Cannes déléguée à l’environnement et conseillère communautaire, Françoise Brunneteaux. Pour mieux s’y préparer, nous sommes convaincus que l’innovation est au cœur des enjeux pour affronter ce que l’on a à affronter".
Djenane avait 6 mois quand sa maman l’a emmenée pour la première fois à Nice en vacances. Elles viennent chaque année depuis. Installées sous leur parasol sur la plage de Carras, mère et fille ont remarqué, comme beaucoup, que la température de la mer a augmenté.
"Avant, on prenait le temps d’entrer dans l’eau. Maintenant, on peut y aller d’un coup. Elle est beaucoup plus chaude par rapport aux années précédentes", constate Djenane.
Selon les données récoltées ce lundi 5 août par la bouée située à l’entrée de la rade à Villefranche-sur-Mer, la température de l’eau s’est élevée à 29,1°C. Habituellement, on atteint 27,5°C au pic de l’été. "C’est quand même inquiétant ces températures. Cela doit avoir un impact sur les poissons", s’inquiète Djenane.
La jeune fille de 19 ans a bien raison de se faire du souci. La mer Méditerranée vit actuellement une canicule marine ou vague de chaleur marine. Ce même phénomène s’était produit en 2022. "On avait enregistré 29,2°C à Villefranche. C’était exceptionnel en intensité mais aussi en durée puisque cela avait persisté 133 jours ", détaille Jean-Pierre Gattuso, directeur de recherche (CNRS-Sorbonne université) au Laboratoire d’océanographie de Villefranche.
3 ou 4 degrés au-dessus des normales
En 2023, des variations assez importantes ont été enregistrées avec des pics très chauds suivis de pics très froids. "Ce n’est pas forcément bon non plus. Les écosystèmes préfèrent des variations assez douces", commente Thibault Guinaldo, chercheur en océanographie au Centre national de recherche météorologique (Météo France – CNRS).
Depuis le 15 juillet, nous sommes à 3-4 degrés au-dessus des normales de saison avec une canicule marine qui est classée comme "forte" (2e catégorie sur 4) depuis le 25 juillet.
Ce qui se passe actuellement n’est "pas une surprise" et "avait été anticipé dans un rapport du GIEC paru en 2019", explique Jean-Pierre Gattuso. Malheureusement, la répétition de ces canicules, qui étaient inhabituelles jusqu’ici, pourrait devenir la norme. De nombreux scientifiques pensent que la Méditerranée va "se tropicaliser".
Des espèces décimées
Ces vagues de chaleur marine entraînent des migrations d’espèces. Elles viennent soit de l’Atlantique tropicale par le Détroit de Gibraltar, soit via le Canal de Suez.
On estime à plus de 1.000 le nombre d’espèces passées de la Mer Rouge à la Méditerranée. "Auparavant, elles ne pouvaient pas survivre mais l’augmentation progressive des températures leur permet de s’installer", détaille Jean-Pierre Gattuso.
La pêche et le tourisme menacés?
Toutes les espèces ne posent pas de problème évidemment mais elles entrent parfois en compétition avec des espèces natives et les forcent à se déplacer. Le poisson-lapin, par exemple. Le risque, c’est que les espèces déplacées disparaissent si elles n’arrivent pas à se rendre vers le Nord.
Les canicules marines, appelées aussi "incendies sous-marins", affectent également les animaux comme les gorgones. En 2022, 10% d’entre elles ont été décimées (voir encadré ci-dessous). Ces changements pourraient à long terme affecter les activités de la pêche, mais aussi le tourisme. "Si les sites de plongée par exemple sont dégradés, il y aura de moins en moins de monde pour venir les voir", estime Jean-Pierre Gattuso.
De plus en plus d’épisodes méditerranéens?
Et sur terre? Quelles conséquences? Le "carburant" des orages étant la température de la surface de la mer, on peut se demander si on doit s’attendre à de plus en plus d’épisodes méditerranéens. "Ces épisodes trouvent leur développement dans les conditions atmosphériques. La température de la mer, si elle reste élevée, apportera du 'carburant' à ces événements qui seront alors plus intenses", estime Thibault Guinaldo.
En contemplant la mer, Samia et Djenane se disent surtout qu’elles seraient très tristes si cette région qu’elles aiment tant changeait. Et de conclure: "On a l’obligation de faire quelque chose". Pour cela, il n’y a qu’un seul moyen: diminuer nos émissions de gaz à effet de serre.
"Des méduses au mois de décembre, je n’ai jamais vu ça de ma vie"
Pendant la canicule marine de 2022, 80% des colonies de gorgones situées jusqu’à 20mètres de profondeur ont été impactées. 10% ont été décimées. "Si cette situation se répète en 2024, leur nombre va forcément diminuer", anticipe Jean-Pierre Gattuso, qui précise qu’il faut 15 ou 20 ans à cet animal marin pour se reconstituer.
Les oursins ont aussi été particulièrement affectés. Pour le moment, il n’y a heureusement pas encore eu de descriptions d’espèces qui se soient éteintes.
Un parallèle avec les feux de forêt
Durant l’épisode de 2022, la couche à 30mètres de profondeur a été exposée pour la première fois à des températures de 25°C.
"Les eaux profondes deviennent tellement chaudes qu’on en arrive à voir des méduses en décembre. Je n’ai jamais vu ça de toute ma vie et en plus, il est probable que ça se reproduise cette année", déplore Roland Séférian, chercheur au Centre national de recherche météorologique.
Pour les spécialistes, il faudrait regarder ces "incendies sous-marins" avec autant d’inquiétude que pour les feux de forêt.
Quel est le problème? Une myriade de bateaux se concentrent l'été le long des côtes des Alpes-Maritimes et du Var. Or plus d'¼ des plaisanciers jettent leur ancre dans les herbiers de posidonie, plante protégée. Ces mouillages dévastent ces forêts sous-marines, véritable poumon de la Méditerranée.
Une application pour mouiller dans le sable
Pour préserver la posidonie, Andromède Océanologie a créé en 2013 l'application Donia, en partenariat avec l'Agence de l'eau.
L'objectif de cette application gratuite: aider les plaisanciers à ancrer dans le sable et donc en dehors des herbiers (posidonie, cymodocée, zostère) et des récifs coralligènes.
"Toute la façade méditerranéenne française est cartographiée, une partie en Italie et en Espagne avec les Baléares. On met à jour les zones impactées", explique Jo-Ann Schies, chargé de mission pour Andromède Océanologie.
Sur son smartphone, elle affiche les cartes où apparaissent en vert les herbiers, puis elle zoome pour montrer les dégâts causés par les ancres. Des traits beiges zèbrent les zones d'herbiers, et des secteurs entiers en beiges indiquent la "matte morte". "La matte c'est l'ensemble des rhizomes (tiges) de la posidonie. Elle séquestre le carbone, qui est ainsi piégé pendant des dizaines, centaines, milliers d'années. Or quand on détruit les herbiers, on libère ce C02", explique Jo-Ann Schies.
Comment ça marche?
Il suffit de télécharger l'application gratuitement sur les stores Android https://play.google.com/store/apps/details?id=fr.donia.app&hl=fr ou Apple https://apps.apple.com/fr/app/donia/id751225905. Puis d'afficher les cartes et de choisir le secteur où l'on prévoit de mouiller.
"On zoome pour aller chercher la tâche de sable où jeter son ancre."
L'application est disponible en français, anglais, italien et espagnol.
Spots de plongée, météo… sont aussi proposés sur l'application. "Il y a toute une partie communautaire, de partage d'informations", note Jo-Ann Schies.
Quels résultats?
Plus de 10 ans après sa mise en service, Donia compte aujourd'hui plus de 65.000 utilisateurs. "On a pu comparer les zones d'ancrage de ceux qui utilisent l'application et de ceux qui ne l'ont pas. Et on observe un meilleur comportement chez les personnes qui se servent de Donia."
De plus, les informations collectées permettent de mieux comprendre comment protéger ces zones. "Elles ont aidé à de nouvelles réglementations comme celle de 2019: les yachts de plus de 24 mètres n'ont plus le droit d'ancrer trop près de la Côte", souligne Jo-Ann Schies.
Donia morring a été mis en place afin de permettre aux yachts de 24 à 70 mètres, via l'application, de réserver une bouée d'amarrage, dans des zones où ils ont l'interdiction d'ancrer.
"Ceux qui l'utilisent paient ce service. La bouée est assez innovante: l'ancrage au fond, fait une espèce d'araignée en acier avec 8 bras qui va en profondeur, ce qui évite une pression sur le sédiment, et résiste à une traction d'un yacht de 70 m."
Dix bouées ont ainsi été installées à Beaulieu, Villefranche-sur-mer et Golfe Juan
A 61 ans, Françoise Loquès est une docteure en biologie marine passionnée. Et passionnante. Formée sur les bancs de l’Université de Nice dans les années 1980, elle n’a depuis cessé de mettre sa réflexion et sa méthodologie au service de la Méditerranée. Impact des micro-plastiques, des rejets médicamenteux, du surtourisme, de la culture aquacole… Inlassablement, la scientifique interroge, dissèque, étaye les menaces qui guettent nos rivages.
Palmes au pied prête à plonger, moulinet en main ou lames de scalpel au bout des doigts sur une paillasse de labo… D’apparence discrète, cette femme brillante, souvent surnommée "le couteau suisse", a aussi su s’imposer avec force dans le monde très masculin de la science. Nous l’avons rencontrée à Nice Ouest, dans la maison du quartier de Carras où elle vit… et a vu le jour. Dans cet îlot de quiétude, jadis entouré de champs, aujourd’hui cerné d'immeubles, elle cultive son jardin - bio - et ses travaux pour un futur moins destructeur du vivant.
Le déclic
A Carras, Françoise Loques grandit avec la mer comme terrain de jeu. Les soirées sur la plage à jouer en famille, les baignades… ont façonné l’enfance de cette Niçoise. Mais c’est un souvenir plus traumatique qui constitue sans doute la première pierre de son engagement au service de la Méditerranée.
"J’étais petite, je nageais là, en face, à Carras quand j’ai été prise dans une grosse vague, sans plus savoir comment en sortir. Depuis, le côté tempétueux de la mer me fait peur, sa force… Trouvant cet élément un peu dangereux, aller expliquer ce qui s’y passe m’a sans doute semblé important", analyse-t-elle à posteriori.
Éprise de nature, la voilà plus tard embarquée dans un cursus de physiologie végétale à bachoter les hormones contenues dans les plantes, le processus qui amène les feuilles à rejoindre le sol à l’automne, les fruits à s’y écraser quand ils sont trop mûrs. C’est là, dans un couloir de l’université de Nice, qu’elle croise, au milieu des années 80, la route du professeur Alexandre Meinesz. "Une thèse sur la posidonie, ça vous intéresse?", lui lance le biologiste marin, réputé comme l’un des meilleurs spécialistes azuréens de la Méditerranée. Le début de son odyssée sous-marine…
"Lors d'une plongée mémorable en Corse, elle a bossé jusqu'au bout de ses forces. Elle avait déjà une grande endurance", Alexandre Meinesz, professeur en biologie marine qui l'a côtoyée étudiante
"Je l’ai lancé sur l'étude des petites plantes à fleurs marines, se souvient volontiers le professeur, aujourd’hui émérite. La posidonie était la plus connue. Françoise Loquès a découvert, au fil de ses recherches dans notre labo, que d’autres ne germaient que quand la salinité de l’eau était faible, dans les zones d’arrivée d’eau douce", retrace-t-il. 40 ans après, il se souvient encore de cette étudiante très opiniâtre. Et d’une plongée "mémorable" en Corse, pour replanter de la posidonie, ce poumon de la mer qui séquestre le carbone en plus d’abriter une riche biodiversité.
"C’était la fin de l’automne, la mer était mauvaise, l'eau froide. Elle a bossé jusqu'au bout de ses forces, on l’a récupérée complètement affaiblie mais elle a tenu jusqu’au bout. Elle avait déjà une grande endurance", salue-t-il.
L’action
Dans le monde masculin des labos de recherche, Françoise Loquès se fraie son chemin. "Je suis un peu féministe et c’était un milieu très macho! J’ai eu des réflexions pas très agréables à mes débuts. Je me rappelle de porter mon matériel et de m’entendre dire: 'retourne à tes cuisines'. Ce genre de remarques qui vous donnent encore un peu plus de pêche."
Pas revancharde pour autant, la Niçoise garde pour fil conducteur de sa carrière sa curiosité insatiable. Son but: être utile, toujours, à la compréhension de cette mer qui la fascine, pour mieux la protéger. Experte en cheffe au sein du Conseil scientifique des îles de Lérins, qu’elle rejoint dans les années 1990, elle mène des études d’impact en amont, pendant et en aval d’aménagements côtiers, veille, évalue, conseille aussi la ville de Cannes sur le réensablement des plages, la mise en place de l’éco-musée sous-marin…
"Dans les eaux polluées, on retrouve notamment la présence de nos détergeants"
Vite, un dénominateur commun à ses travaux se dessine: l’impact de l’homme sur l’environnement. A travers, notamment, les rejets en mer des stations d’épuration. "Au sein du conseil scientifique, on a, par exemple, étudié les effets des embruns sur la végétation. Dans les eaux polluées, on retrouve notamment la présence de nos détergents, qui ont la capacité de dégrader les graisses. Au contact de la cuticule des feuilles des plantes, qui est une couche de lipides, ils vont l'abîmer, qui plus est avec l’effet combiné du sel. Aux îles de Lérins, sur 4 points d’analyses sur le rivage, la végétation était comme brûlée", détaille-t-elle.
Niçoise, Françoise Loquès habite à Carras, dans la maison de famille qui l'a vue naître. Photo Franck Fernandes.
"J'ai trouvé jusqu'à une quarantaine de microfilaments de plastique par moule, un problème de sécurité sanitaire"
C’est aussi elle qui met au jour la présence de microplastiques dans les sédiments et les organismes vivants de nos côtes. Pour cela, la voilà plongeant par 12 m de fond pour y déposer des cages de moules, destinées à nourrir ses analyses. "Mes rats de laboratoire", sourit-elle. Ainsi, elle révèle une contamination notable aux microfilaments en polyester, issus des vêtements synthétiques lavés en machine… "En 2021, j’ai trouvé jusqu’à une quarantaine de microfilaments par moule, un problème de sécurité sanitaire", met-elle en garde.
En parallèle, l’insatiable sentinelle, pêche au lamparo des poissons pour explorer une autre piste : la présence éventuelle de médicaments dans la mer et ses habitants. Une fois encore, seul un travail scientifique rigoureux le dira.
De 2018 à 2022, la scientifique bataille pour décrocher des financements indispensables à l’analyse des quelques 200 prélèvements qu’elle fait dans l’espace de dilution des rejets des stations d’épuration de Vallauris Golfe-Juan et de Cannes: eau, sédiments, foies et muscles de poissons, moules.
Verdict: des poissons de nos rivages contiennent bien… des anti-inflammatoires. La lanceuse d’alerte va alors plus loin et rédige un guide gratuit pour sensibiliser le grand public, le diffuse, le défend dans des conférences, des colloques de médecin pour inciter à des prescriptions plus responsables.
Et maintenant?
Vaillante, Françoise Loquès sait aller au bout de ses engagements. Et en reconnaître les difficultés. "Pour mes travaux sur les médicaments, je me suis heurtée au refus de financement de collectivités locales. Soutenir des études contres productives pour l’image de marque du territoire n'intéresse souvent pas…", pose-t-elle. Qu’importe, elle continue.
Depuis 2023, la scientifique a quitté le Conseil scientifique des îles de Lérins, monté Mission bleue, son cabinet de conseil en environnement. Avec pour unique objectif d’éclairer la société, les comportements.
"Je suis affolée par les crèmes solaires, un vrai poison. Quand vous voyez le film lipidique à la surface de l’eau les fins de journées d’été à la plage, évidemment que ça inhibe la photosynthèse!", lance-t-elle. Les fartage des skis la questionnent aussi. "Quand la neige fond, l’eau va dans les nappes phréatiques. Quels effets ont ces matières-là sur la nature?"
Autant de problématiques à explorer méthodiquement. A condition de trouver des financements. "Politiquement pour l’instant, je sens qu’il faut taire certains sujets. Mais la politique de l'autruche n’a pas de sens car elle oblige à traiter les problèmes dans l’urgence plutôt que de les anticiper", prévient-elle.
Passionnée de nature, elle randonne ou cultive son jardin - sans pesticides - quand elle n'est pas sur le terrain. Photo Franck Fernandes.
Mère de deux grands enfants, à qui elle expliquait, petits, "les atomes, les protons" à grand renfort de dessins tracés sur la plage, Françoise Loquès trouve satisfaction dans cette idée: "c’est pour la jeunesse que je fais tout ça."
Alors quand elle n’est pas en train de mener ses expériences, la voilà animant des conférences*, vulgarisant inlassablement. Le reste du temps? Vous la croiserez peut-être sur les sentiers de randonnée de l’arrière-pays ou sillonnant la côte à vélo. Avec toujours un œil sur la mer.
*Ce mardi 9 avril 2024, à 9 heures, conférence "La Méditerranée, ses richesses et ses menaces", par Françoise Loquès, espace Laure Ecard, quartier Saint-Roch à Nice. Plus d’infos ici. https://unia.fr/emploi-du-temps/
Opération nettoyage des fonds marins à Antibes ce vendredi sur le quai du Port Gallice. Des déchets sous-marins ont été retirés, comme une épave navire de plus de 4 mètres.
"En voilà, une belle initiative". La satisfaction se lit logiquement sur les lèvres de Sébastien Leroy, Maire de Mandelieu. En ce lundi après-midi, dans la zone industrielle des Tourrades, c’est une nouvelle bataille remportée par la ville mandolocienne contre la pollution: grâce à l’association Herocéan, à l’initiative du projet, la Ville procède à la pose du 32ème filet antidéchet sur la commune, le premier au sein d’une zone commerciale privée… en France.
Car oui, aussi bizarre que cela puisse paraître, et alors que les zones commerciales sont reconnues pour être des zones extrêmement polluées, notamment en raison des nombreux détritus et mégots de cigarettes jetés au sol, la zone des Tourrades peut désormais se targuer d’être la première zone commerciale privée de France à être dotée non pas d’un, mais de trois filets antidéchets posés sur les plaques d’égout.
Filtrer les macros et micros déchets
Des filets, réalisés à partir de 60% de cheveux et 40% de bouteilles plastiques recyclées, qui permettent de filtrer les macros et micros déchets et d’intercepter les hydrocarbures, grâce à son rôle absorbant.
"Le message que l’on souhaite faire passer, c’est que, ce genre d’acte, c’est une vraie écologie, au contraire de grands discours creux que l’on peut entendre, indique le premier magistrat de la Ville. C’est une action concrète de terrain. Ce dispositif permet d’intercepter les déchets avant qu’ils ne se retrouvent à la mer." Car, en effet, contrairement à ce que l’on peut penser, l’eau - et surtout les déchets - qui sont aspirés dans les bouches d’égout lors d’intempéries, se retrouvent directement… à la mer. "Ces filets, que nous allons mettre en avant avec des dispositifs visuels, doivent permettre à tous les citoyens de prendre conscience de l’importance de ne pas jeter les déchets sur le sol."
Un dispositif pris en charge à 100% grâce au mécénat
Outre l’aspect écologique non négligeable, l’autre aspect positif de la pose de ces filets anti-déchets est qu’ils ne coûtent rien au contribuable: les 3 nouveaux filets posés ce lundi, d’une valeur totale de 2.700€, sont financés à 100% par une entreprise privée, en l’occurrence Abioxir, via l’association Hérocéan. "C’est du mécénat, confirme Daphné Sanchez Asikian, responsable et instigatrice du projet. Nous avons souhaité mettre en place ce dispositif et, une fois les fonds recueillis, nous avons pu en parler à la mairie de Mandelieu." C’est d’ailleurs une entreprise locale spécialisée dans le développement de solutions anti pollutions et anti déchets, Pollustock, qui a été mandatée pour la fabrication et la pose des filets.
Que ce soit à Mandelieu, à Cannes ou encore à Théoule-sur-Mer, de nombreuses communes ont, depuis plusieurs années déjà, mis en place ces filets de protection qui permettent de couper le robinet des déchets à leur source. Même si le meilleur moyen de lutter contre la pollution reste tout simplement de ne pas jeter ses déchets et mégots sur le sol.
Il y a du neuf, sur le front de la posidonie. Et les nouvelles sont bonnes. "Je ne pensais pas que je verrai ça un jour. Après des années de perte, les herbiers sont en meilleure santé."
En tant qu’expert mer, Pierre Boissery a toujours soutenu que les actions de protection permettent de changer la donne.
Cette embellie exauce les efforts, conforte la démarche scientifique et valide l’efficacité de la réglementation. Celle-ci repose sur les poursuites judiciaires, qui peuvent être engagées en cas d’infraction caractérisée.
Ce vendredi, le tribunal de Marseille va se prononcer sur une destruction de posidonie au large du Var et des Alpes-Maritimes. Le skipper du bateau a déjà été condamné, il reste à connaître le montant du préjudice écologique.
Spécialiste des eaux côtières en Méditerranée, au sein de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, Pierre Boissery le martèle: on a raison de persévérer.
Comment se portent les herbiers de posidonie?
On a une cartographie précise des herbiers de posidonie, qu’on met à jour tous les trois ans. Les derniers chiffres n’ont pas encore été publiés. C’est un scoop: on a presque 300 hectares d’herbiers, exactement 287 hectares, qui ont repris dans des endroits où on pensait que l’herbier était mort.
Des herbiers qui ont grandi?
Non, ce sont des endroits où l’herbier avait disparu, où la matte morte était couverte par du sable. On se retrouve avec une forme particulière de pousse d’herbiers, qu’on ne connaissait pas. Ce sont des îlots ronds, qui grandissent. Il y en a partout en Région Sud, aussi en Occitanie. Chaque fois qu’on a mis à jour des cartes, on a trouvé de nouvelles observations. Je suis complètement surpris, c’est une forme de repousse qui n’avait jamais été décrite.
Comment cela s’explique-t-il?
C’est le résultat d’un travail engagé il y a 40 ans. D’abord, on corrèle ces repousses à l’amélioration de la qualité de l’eau. Historiquement, la première cause de destruction des herbiers était la pollution. Cette cause-là a disparu avec la mise en place de l’assainissement dans les stations d’épuration. La deuxième cause était la destruction du littoral. En 1986, la loi littoral a permis d’agir.
Pourquoi la plaisance est-elle devenue un tel problème?
Il y a une dizaine d’années, on a vu la montée en puissance du yachting et de bateaux de plus de 20m. On s’est rendu compte à quel point les mouillages détruisent l’herbier. La préfecture maritime a tenu à la bonne application de la réglementation, malgré les avis négatifs. On régule une activité, comme on l’a fait pour la pollution. D’abord lutter contre les gros foyers, ensuite les moyens, puis les petits, si c’est nécessaire.
Donc, la réglementation est efficace?
En deux étés, on a freiné de manière très significative les mouillages dans les herbiers [pour les bateaux au-dessus de 24m, parfois 20m]. Je ne connais pas d’autre action écologique aussi efficace. Il reste les 5 à 10% de gens qui ne respectent pas la loi. En matière d’écologie, on a besoin de bonnes lois et puis d’appliquer ces lois. Si un privé détruit un capital commun, c’est le bon sens qu’il participe à le réparer. La loi de protection de la nature [de 2016] évoque le principe de "destructeur-réparateur".
Comment s’estime la "valeur" d’un herbier?
Stockage de carbone, protection des plages, croissance des poissons… On arrive à peu près à une évaluation de 600.000 euros par hectare. Autre mode de calcul, basé sur ce que coûte un plongeur sous l’eau qui ramasse des feuilles de posidonie et les repique. En France, il va falloir travailler encore sur la notion de préjudice écologique. Déjà, condamner celui qui a détruit l’herbier, par principe, je trouve ça très bien. Mais je précise que quel que soit l’argent qu’on met, on ne trouvera pas l’équivalent à un herbier détruit.
La répression est nécessaire?
Quand on réfléchit un peu, ça fait 40 ans qu’on fait des notes, de la sensibilisation, des plaquettes… On a continué à perdre de l’herbier. Là, autour d’une réglementation qui se renforce et qui est appliquée, on annule 90% des atteintes, en deux étés. Cela nous interpelle beaucoup sur ce qui est efficace
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Du S au XL et du sur-mesure
Si la marque propose ses collections des tailles S à XL, elle fabrique sur mesure les maillots pour ceux qui ne trouveraient pas de modèles à leur taille. « On prend les mensurations et la personne reçoit son maillot en quelques jours. Et pour le même prix ! Il n’y a pas de raison qu’on pénalise les gens qui ne trouvent pas le modèle qui leur va. »
Il est possible de se rendre au show-room de Bikunu, au Cannet, 11 rue des Moulières, là où sont confectionnés tous leurs produits, et de les essayer ou de venir pour du sur-mesure, donc. Pour prendre rendez-vous, ça se passe sur leur site Internet ! https://www.bikunu.fr/booking-calendar/visitez-notre-showroom?location=5c8f34f2-0b8d-4812-a6cd-050f54b11a16&referral=service_list_widget
Découvert par article Nice Matin https://www.nicematin.com/conso-shopping/au-cannet-bikunu-developpe-son-offre-pour-bronzer-habille-924004
Une daurade d’élevage passe jusqu’à quatre ans dans un bassin. Nourrie tous les jours, sauf s’il fait trop chaud.
Protégés de l’appétit des mouettes par des filets tendus, bars et daurades croisent, devant le littoral de Cannes et de Vallauris.
Dans la ferme aquacole de Jérôme Hémar, on produit non seulement du poisson, mais aussi de la donnée et de l’anticipation.
"Depuis deux ans, les sondes de BiOcéanOr permettent le suivi de la température de l’eau et l’oxygène dissout, s’enthousiasme le directeur d’Aquafrais Cannes. Les informations sont connues en temps réel." Mais BiOceanOr fait plus que des relevés.
"On offre la possibilité de prévoir les variations, livrent Samuel et Charlotte Dupont, fondateurs de la start-up. Grâce à notre algorithme, on sait quelle va être la qualité de l’eau, demain. C’est mettre des yeux là où avant, on était aveugle."
Risque de carence
Cette analyse prédictive est le résultat d’une modélisation basée sur la courantologie, la météo, l’imagerie satellitaire (on y voit les teneurs en chlorophylle de la mer)... Au carrefour entre science du climat, biologie marine et traitement de données. Un modèle unique au monde, perfectionné entre Sophia-Antipolis, Sète et La Seyne-sur-Mer.
Posant pied au bord des bassins, David Porcq n’a d’yeux que pour les poissons qu’on voit tourner en rond. Chef technique de la maintenance en mer chez Aquafrais Cannes, il "s’occupe du bien-être du poisson". Le meilleur exemple est le risque de carence en oxygène, qu’il faut impérativement éviter. "On adapte l’apport en nourriture, la densité des poissons dans un bassin, on change les filets..."
Le logiciel livre une prédiction fine à 24 heures, indicative à 48 heures.
"Pouvoir prédire ce que sera le taux d’oxygène, c’est notre cœur de métier, décrypte Pierrick L’Heveder, chef de projet chez BiOceanOr. Quand la température de l’eau est élevée, il est plus compliqué pour l’oxygène de se dissoudre. Cela change le métabolisme du poisson."
En dépend sa bonne santé – et le risque de mortalité. "Le contexte du réchauffement climatique nécessite d’apporter de la modernité pour mieux anticiper ces variations." L’été dernier, dans la baie de Cannes, l’eau est montée à 29°C.
Une autre innovation repose sur des caméras intelligentes, immergées depuis six mois à Cannes, pour "mesurer la croissance du poisson et planifier les cycles d’élevage."
Localement, la thématique la plus sensible est l’acceptation de l’aquaculture sur le plan d’eau. Les pêcheurs de la prud’homie de Vallauris s’inquiètent des impacts environnementaux.
"Il s’agit d’une ferme aquacole remarquable", commente Philippe Valette, océanographe et membre du conseil scientifique de la Fondation de la mer, lors d’une visite de terrain.
Cette exploitation azuréenne est carrément qualifiée de "diamant". Une sorte de modèle à suivre sur notre littoral. En France, la moitié du poisson consommé provient de l’aquaculture, dont 80% sont importés. Mais, les projets aquacoles peinent à sortir de l’eau.
"Il y a beaucoup d’idées reçues et d’incompréhension. Pourtant, la pêche et l’aquaculture sont rarement concurrentes, suggère Philippe Valette. Il s’agit de mettre tout le monde autour de la table, pour trouver le moyen de gérer, ensemble, des lopins de mer."
Justement, Aquafrais Cannes a le projet de créer un nouveau parc et l’ambition de doubler sa production. Un cas concret pour la Fondation de la mer, qui veut "réconcilier économie et écologie".
Il y a le navigateur, ex-accro à "une drogue dure", la vitesse et la compétition. Il y a l’océanographe qui perçoit la vie "par les liens qu’elle tisse". Et l’activiste du climat qui "ose les brèches de désobéissance".
Un trio comme un compagnonnage qui interpelle le mythe du progrès - "en quoi vider la mer serait un progrès?". Et se désespère des décisions politiques à rebours de la connaissance - "On ne peut pas dire qu’on ne sait pas. Nous avons la liberté d’écrabouiller le monde. Ou de tout faire pour vivre en harmonie avec lui. Nous sommes la seule espèce à pouvoir faire ça."
Surnommé Bilou, le navigateur est Roland Jourdain, double vainqueur de la Route du rhum. Un quasi-repenti de l’esprit de compétition, acharnée des courses au large.
Le spécialiste de la société subtile des cachalots, c’est l’océanographe François Serano. Ses mots donnent vie "au monde sauvage, qui est libre et n’a pas besoin de l’Homme".
Enfin, la militante en bataille contre l’exploitation des minerais dans le fond de la mer, c’est Camille Étienne.
Les trois se sont retrouvés à Toulon cette semaine, après avoir partagé quelques jours et nuits de navigation, dans le cadre d’une mission scientifique en Méditerranée, juste devant nos côtes. Leurs trois voix racontent une histoire commune. "Moi, je viens de la montagne, du fin fond de la Savoie, débute Camille Étienne. Je suis passionnée par les glaciers, mais pas à l’aise dans l’eau." L’océan était "un impensé", un lieu "vide, noir et silencieux".
Il y a trois ans, pour éviter de prendre l’avion, elle navigue à voile, jusqu’en Islande. Une révélation. "Comme si, à 23 ans, je découvrais la moitié de l’humanité. Un monde entier."Et voilà le premier point de leur argumentaire. "On ne peut pas protéger ce qu’on ne connaît pas, ce qu’on n’aime pas."
Alors connaître, oui mais par quel bout ? François Sarano a sa réponse. Avec sa femme Véronique Sarano, le plongeur, océanographe et fondateur de l’association Longitude 181, a passé des décennies à amasser des connaissances sur la vie marine - et il continue de le faire. Mais devant le public, son obsession est de parler de liens. "La biodiversité, ce qui définit le vivant, ce sont les liens que chacun tisse. On parle de toile du vivant." Il file la métaphore. "Un écosystème est comme un gilet. Si une seule maille est ouverte, le tout s’effiloche". Ce lien, chacun peut l’expérimenter "dans la rencontre authentique" avec d’autres animaux.
Et c’est le deuxième argument. "Tant qu’on considérera les autres vivants comme à notre service, comme une ressource, on ne changera pas".
L’endroit où le climat change le plus
Justement sur le fil, l’exploitation minière des fonds marins en arctique, « l’endroit au monde où le changement climatique est le plus rapide », insiste Camille Étienne. "Nous avons réussi à gagner du temps avec le gouvernement norvégien, pour faire en sorte qu’ils autorisent seulement l’exploration minière." Et non l’exploitation.
Pas une victoire totale, mais déjà un enseignement sur les vertus de la mobilisation collective.
"Ne doutez jamais, jamais, des actions menées, même une petite action, même si ça a l’air insignifiant. Pour la Norvège, un demi-million de personnes ont signé une pétition pour refuser l’exploitation minière." La liste des noms a été remise symboliquement dans les mains des membres du gouvernement. "Et cela nous a échappé, ça a basculé." Dans le bon sens.
Même l’homme qui a navigué grâce au souffle du vent a fini par faire le bilan de son activité, la course au large, et à en tirer les leçons. "Finalement, c’est facile de changer d’aventure, plaide le navigateur Roland Jourdain. J’ai fini par me guérir de la drogue dure que j’avale depuis 40 ans, celle d’essayer d’aller toujours plus vite."
Après une collision contre une baleine, il a été "dur de réaliser qu’on fait beaucoup de dégâts pour sa passion". Ce "choc" l’a changé et amené à "réfléchir autrement", troisième piste ouverte.
Sa nouvelle aventure s’appelle We Explore, un catamaran en partie construit en fibre de lin, devenu outil au service de la recherche et de la pédagogie.
"Il est possible de retrouver une Méditerranée riche, exubérante, foisonnante, ajoute son coéquipier et ami François Sarano. Une mer qui sera notre meilleur allié pour le climat, pour l’avenir". Si nous changeons nos méthodes.
La course illimitée aux ressources est impossible dans un monde qui n’est pas infini. L’arrivée sur la côte atlantique d’un navire géant de pêche industrielle en est un exemple sévère. "De tous les dérèglements, la pêche est le plus terrible. Le chalutage équivaut à une forêt qu’on détruit… pour ramasser une pâquerette."
À cause du dérèglement climatique et du manque de prédateurs, le poisson-lion devrait arriver sur la Côte d'Azur d'ici cinq ans, d'après les spécialistes. Vorace et nocif, il mangerait alors de nombreux poissons et pourrait déstabiliser l'équilibre de la mer Méditerranée.
Dans quel état se trouve la mer Méditerranée ? Un débat public a eu lieu ce mercredi 13 mars au Cum, le Centre universitaire méditerranéen de Nice, en présence de scientifiques, experts, mais aussi élus de la Ville. Disparition des espèces, réchauffement, déchets plastiques : de nombreux sujets ont été abordés par les intervenants présents lors de cette journée. En mer Méditerranée, on compte 14.500 espèces différentes mais "aucune n'a totalement disparu" assure Alexandre Meinesz.
L'écologue, biologiste marin et professeur émérite à l'université de Nice, ajoute même que 1.000 espèces supplémentaires ont été recensées, même s'il concède que certaines sont en grand danger d'extinction. Pour autant, les scientifiques redoutent l'arrivée d'un type de poisson : le poisson-lion.
Déjà présent dans les Caraïbes
D'après les scientifiques, ce poisson invasif et nocif devrait arriver chez sur la Côte d'Azur d'ici cinq ans. Appelé aussi "rascasse volante", il vient de mer Rouge. "On l'a aperçu en Italie, près de New-York, dans l'océan Atlantique, donc cela montre qu'il peut aussi évoluer dans les mers plus froides", remarque Alexandre Meinesz qui précise que "c'est un prédateur vorace qui va manger beaucoup de poissons".
Cette espèce est très urticante, il ne faut pas la prendre dans la main. Le poisson-lion n'a aucun prédateur en Méditerranée à part l'homme. "Cette nouvelle espèce trouve un terrain très agréable pour elle en Méditerranée, car, d'habitude, en mer Rouge, elle a d'autres prédateurs", note Nathalie Himli, responsable de la section économie environnementale au centre scientifique de Monaco.
Et manque de chance pour le poisson-lion, il a bon goût. "Il faut qu'on apprenne à le pêcher et à le cuisiner, car sa chair est fine. Pour le consommateur, il faudrait développer un goût particulier pour ce poisson, mais il est vraiment très bon", explique-t-elle.
Espèce emblématique de la Méditerranée, la posidonie protège le littoral de l’érosion en freinant la houle de fond et absorbe le dioxyde de carbone contribuant ainsi à ralentir les effets du réchauffement climatique. Seulement voilà, en plus d’être victimes de la pollution, les herbiers sont trop souvent arrachés par les ancres des bateaux.
La solution? Des mouillages écologiques. Ainsi sont nées les ZMEL (zones de mouillage et d’équipements légers) qui délimitent et aménagent, sur le domaine public maritime naturel, des aires d’accueil pour les bateaux, sur points de fixation ou sur ancres, dans les secteurs fréquentés par les plaisanciers dont les fonds abritent des espèces protégées.
À Villefranche, la posidonie reprend
Parmi les sites équipés des Alpes-Maritimes: la rade de Villefranche-sur-Mer.
"Protéger les posidonies, c’est fondamental, explique Nicolas Frouté, responsable ZMEL à la mairie. 52 bouées ont été installées pour l’été 2022. Certaines sont louées à l’année, d’autres à titre temporaire d’avril à octobre. Depuis, on a vu clairement la posidonie reprendre dans la rade qui est aujourd’hui très propre. La ZMEL est une belle alternative pour gérer l’affluence et la démocratisation de la plaisance. Elle offre un espace de liberté et sécurisé. C’est une jolie promesse de développement."
Dans les Alpes-Maritimes, quatre ZMEL sont opérationnelles: à Villefranche-sur-Mer donc, mais aussi au cap d’Antibes, à Cannes (embouchure du Béal) et à l’île Sainte-Marguerite (Lérins). Et trois projets sont lancés: un nouveau sur les îles de Lérins, à Théoule-sur-Mer et au Port du Crouton à Antibes.
Exposition photo vu à Pont du Fossé en Janvier 2024
Avec le changement climatique, est-ce que la Méditerranée va devenir chaude toute l'année?
A l’occasion de la 28e Conférence des parties sur le climat des Nations unies (Cop 28), qui se tient jusqu’au 12 décembre à Dubaï, la rédaction répond tous les jours aux interrogations de lecteurs. Vous vous demandez si la Méditerranée va devenir chaude toute l’année.
Pour vous répondre, nous avons sollicité Jean-Pierre Gattuso, directeur de recherche (CNRS-Sorbonne université) au Laboratoire d'océanographie de Villefranche, co-auteur pour le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) et membre du Grec-Sud, équivalent du Giec en Paca.
"Cela ne va pas être les Tropiques en hiver. Mais oui, la mer se réchauffe", Jean-Pierre Gattuso, océanographe
"Toutes les mers et océans se réchauffent. À l'échelle mondiale, par exemple, la température de surface était en septembre 1.2°C au-dessus de la moyenne (calculée entre 1850 et 1900). Et la Méditerranée ne fait pas exception", pose d’abord le spécialiste.
Mer quasi fermée, elle se réchauffe même beaucoup plus que l'océan mondial. Il faut ainsi une centaine d’années pour que ses eaux s'échangent avec celle de l'Atlantique, via le goulot d'étranglement que représente le détroit de Gibraltar.
En l'espace de 15 ans, sa température a augmenté d'1°C.
Mais cette hausse reste hétérogène selon les saisons.
"De décembre à fin février, elle est moins marquée. Car les eaux de surface se mélangent avec celles des profondeurs, qui se réchauffent nettement moins vite. Pendant cette période, la Méditerranée est en général de 13°C sur nos côtes. A l’avenir, elle pourrait évoluer vers quelques dixièmes de plus, mais cela ne va pas être les Tropiques en hiver", nuance Jean-Pierre Gattuso.
Des canicules marines estivales délétères
Nettement plus problématique, la hausse de la température de l’eau est très marquée sur nos rivages en été.
"La Méditerranée a même été touchée par des canicules marines deux étés de suite, en 2022 et 2023", note Jean-Pierre Gattuso. Un phénomène qui survient quand la température de la mer est supérieure à 90% des températures les plus chaudes historiquement enregistrées, et ce durant au moins cinq jours.
"Par exemple, à l’entrée de la rade de Villefranche-sur-Mer, la température de surface a atteint 29,2°C en juillet 2022. C’est un record absolu depuis les années 1950 et plus de 1°C au-dessus du précédent record", s’inquiète l'océanographe azuréen.
"Il semble que nous avions sous-estimé la vitesse des changements", Jean-Pierre Gattuso, océanographe
Si cette hausse de l’intensité et de la fréquence des vagues de chaleurs marines n’est pas une surprise, car "prévue dans le rapport du Giec que nous avons publié en 2019", "il semble que nous avions sous-estimé la vitesse des changements", reconnaît le scientifique.
Selon le MedECC, groupe d’experts du climat en Méditerranée, "un réchauffement des eaux de surface de 1 à 4°C est attendu d’ici à 2100, selon le scénario de lutte contre le changement climatique".
Et celle-ci est très loin d’être sans conséquence. "Il entraîne l’apparition d’espèces invasives en provenance de la mer Rouge et de l’océan Atlantique tropical. On estime que plus de 1000 espèces tropicales ont ainsi traversé le canal de Suez pour s’installer en Méditerranée", étaye Jean-Pierre Gattuso.
Parmi elles: poissons-lions, poissons-lapins mais aussi des parasites qui menacent directement la biodiversité marine.
Les travaux de multiples collègues montrent que des mortalités massives de coraux, éponges et gorgones interviennent après chaque vague de chaleur marine sur nos côtes", ajoute le scientifique, co-auteur pour le Giec.
En août 2023, deux scientifiques azuréens du CNRS détaillaient ainsi les conséquences mortifères sur la biodiversité marine.
Préoccupant, le phénomène porte même un nom: "la tropicalisation" de la Méditerranée.
Sait-on de quelle hauteur la Méditerranée va s’élever dans le futur?
A l’occasion de la 28e Conférence des parties sur le climat des Nations unies (Cop 28), qui se tient jusqu’au 12 décembre à Dubaï, la rédaction répond quotidiennement aux interrogations de ses lecteurs sur le sujet. Vous vous demandez quelle pourrait être l’ampleur de l’élévation du niveau de la Méditerranée dans le futur.
Mer fermée, la Méditerranée a tendance à "s’élever moins vite que l’Atlantique, elle a sa propre dynamique, qui ne peut pas être identique à celle des autres océans", nous indiquait récemment Jonathan Chenal, en charge de la stratégie sur le changement climatique à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN). À Marseille, les relevés récents indiquent une hausse de 3 millimètres par an.
"L’élévation du niveau de la mer est l’un des effets irréversibles du changement climatique", Philippe Rossello, géographe azuréen
Pour vous répondre sur ce qui pourrait se passer dans le futur, Philippe Rossello, géographe, expert en prospective (étude des scénarios du futur) et coordinateur du Grec-Sud, équivalent du Groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) en Paca, s’est plongé dans les données scientifiques locales. Et elles sont relativement précises à ce sujet.
"D’ici 2050, le niveau de la mer Méditerranée augmentera d’environ 25 cm quel que soit le scénario socio-économique du Giec. C’est l’un des effets irréversibles du changement climatique (au moins pour ces prochains siècles)", abonde le scientifique.
Mais pour aider les territoires côtiers à planifier leur nécessaire adaptation, les nombreux spécialistes du Grec-Sud travaillent à des scénarios à encore plus long terme:
"Il faut d’ores et déjà anticiper une élévation plus conséquente : d’ici 2100, elle sera de l’ordre de 40 cm en cas de scénario optimiste et d’un mètre, voire plus, en cas de scénario pessimiste", détaille Philippe Rossello.
"En 2150, même en cas de scénario optimiste, il faut compter sur au moins 55 cm d’élévation", ajoute-t-il encore.
D’ici à 2050, "les petites plages de sable (de faible largeur) délimitées par une falaise, des constructions ou des aménagements disparaîtront". Celles entre Villeneuve-Loubet et le Fort carré d’Antibes, par exemple, enclavées contre la route, sont particulièrement vulnérables.
En 2021, l’ONG Climate central a réalisé une carte qui permet de déterminer quelles zones côtières de la Côte d’Azur pourraient se retrouver sous le niveau de l'eau en 2050. https://www.nicematin.com/environnement/ces-lieux-de-la-cote-dazur-qui-pourraient-se-retrouver-sous-leau-en-2050-a-cause-du-changement-climatique-710247
"Le phénomène prendra de l’ampleur dans la seconde partie du siècle, menaçant les plus grandes plages, et de manière plus générale, le littoral", analyse le géographe.
En plus de contribuer à l’érosion des plages et au recul du trait de côte, "cette élévation a aussi pour effet de saliniser les nappes phréatiques", abonde le climatologue Joël Guiot, spécialiste des écosystèmes méditerranéens. Avec, à la clé, un impact négatif sur la ressource en eau potable.
Les raisons de l’élévation, une équation complexe…
"Les processus et mécanismes physiques en jeu sont complexes", indique Philippe Rossello.
Au sein du Grec-Sud, l’association d’experts régionaux sur l’évolution du climat regroupant de nombreux scientifiques locaux (climatologues, économistes, sociologues, experts en biologie marine, agriculture, forêts, littoraux…), une étude fouillée sur la mer et le littoral décortique notamment les causes de cette élévation.
"La hausse du niveau des mers du globe est principalement due à l’effet de dilatation des océans, résultant de l’augmentation de la température de l’eau qui est observée depuis des décennies en Méditerranée", peut-on y lire.
"Avec la fontes incertaines des calottes du Groenland et de l’Antarctique, une élévation de plusieurs mètres d’ici la fin du XXIe siècle n’est pas exclue"
Si le thermomètre monte en surface, les progrès en matière d’instruments de mesure permettent de constater que le phénomène est aussi à l'œuvre dans les eaux profondes.
Si cette "dilatation thermique" contribuerait à elle seule à une hausse du niveau de la mer Méditerranée comprise entre 45 et 60 cm à la fin du XXIe siècle, le phénomène se combine à d’autres causes d’élévation du niveau global des océans.
"En premier lieu, la fonte des calottes glaciaires, qui ferait monter le niveau de la mer Méditerranée d’environ 80 cm", précise le rapport du Grec-Sud.
Mais ce dernier point comprend une part très importante d’incertitude, et ce n’est pas une bonne nouvelle…
"La contribution de l’augmentation de la fonte des calottes du Groenland et de l’Antarctique reste très incertaine: une augmentation du niveau de la mer de l’ordre de plusieurs mètres n’est pas exclue", mentionnent également ces travaux.